Oumar Kateb Yacine du think tank, Institut Afrique Émergente : « tout recours à la force au Niger sera une grosse bêtise et risque d’embraser la sous-région »
Mediaguinee: Ce dimanche expire l’ultimatum lancé par la CEDEAO à la junte nigérienne de rétablir le président déchu, Mohamed Bazoum, faute de quoi, elle fera recours à la force …
Je ne crois pas que cela serait aussi facile. Le Nigeria qui partage avec le Niger 1500 km des frontières aurait mobilisé 50.000 hommes bien équipés, on parle aussi de la Côte d’Ivoire, du Sénégal, du Bénin. Mais, ils vont s’attaquer à un pays qui a une armée régulière. Cela ne sera pas comme ce qui s’est passé au Liberia ou en Sierra Leone dans les années 1990 avec l’intervention de l’ECOMOG dont la présence à l’époque n’a pas été précédée de succès comme on le prétend aujourd’hui. Ces pays en guerre civile à l’époque n’avaient pas des armées dignes de nom avant l’éclatement de la guerre. C’étaient des rebelles formés dans le tas, armés et drogués qui semaient la terreur.
Cette fois-ci, il s’agira de s’attaquer à une armée régulière même si on compte sur une éventuelle défection de certaines unités de l’armée nigérienne.
Seul le dialogue pourrait être salutaire pour toutes les parties. Une intervention militaire au Niger serait une grosse bêtise. On apprend ce matin que Bazoum n’a ni vivres ni électricité au palais. Tout recours à la force pourrait mettre sa vie en danger, et le pays ne serait plus gouvernable. Or, on souhaite un retour à l’ordre constitutionnel. La France a évacué ses ressortissants et ceux de ses alliés. Aux Africains de comprendre la situation pour éviter un autre drame humanitaire au lieu de suivre à la lettre les consignes données par des puissances étrangères qui pillent ce continent depuis plusieurs siècles. Elles ont d’autres intentions que de nous aider à sortir de la pauvreté. Ce que nous vivons aujourd’hui dans le Sahel, en majeure partie, est une conséquence de la déstabilisation de la Libye par la France, la Grande Bretagne et les États-Unis .
Si on donne l’occasion aux forces terroristes et celles de Wagner que la Russie, aux aguets, n’hésitera pas de mettre à la disposition du Niger, la situation sera plus grave. Les forces occidentales auront un prétexte de plus pour rester dans nos pays.
Bref, s’il reste une once de lucidité aux chefs d’État de la CEDEAO, ils vont suivre la position des pays comme le Tchad et l’Algérie qui privilégient le dialogue. Car tout porte à croire qu’il existe un plan de déstabilisation de la sous-région. Le Nigeria, en tant que première puissance économique du continent devrait jouer le rôle de stabilisateur de paix et développement dans la sous-région que de céder à l’émotion et être un vecteur de destruction.
L’Afrique a besoin d’un leadership devant la mener à un niveau de développement élevé à l’instar des pays de l’Asie du Sud-Est et d’une union sacrée face à la ruée de toutes ces puissances vers le continent qui ne sont attirées que par les richesses de nos pays.