La pratique de l’excision en Guinée : une réflexion sur les conséquences et les défis actuels [Aboubacar Sakho]
En République de Guinée, la pratique de l’excision, ou mutilation génitale féminine (MGF), demeure une réalité douloureuse pour de nombreuses femmes et filles. Cette coutume profondément enracinée engendre des conséquences physiques, psychologiques et sociales graves, qui continuent d’affecter des générations entières malgré les efforts croissants pour l’éradiquer.
Les conséquences physiques de l’excision sont particulièrement alarmantes. Les procédures, qui varient de la simple incision à l’ablation totale des organes génitaux externes, entraînent souvent une douleur aiguë et chronique. De plus, les risques d’infection, de saignements et de complications lors de l’accouchement sont élevés. Les problèmes urinaires et menstruels, tels que des difficultés à uriner, des infections urinaires fréquentes et des menstruations douloureuses, sont également courants. Les femmes excisées peuvent également éprouver des difficultés sexuelles, y compris des problèmes de lubrification et une diminution du plaisir sexuel.
Sur le plan obstétrical, les complications pendant l’accouchement sont fréquentes, augmentant le risque de césariennes et d’hémorragies post-partum. Les conséquences psychologiques de l’excision sont tout aussi sévères, avec des traumatismes émotionnels qui engendrent douleur, anxiété, dépression et confusion sur l’identité corporelle et la sexualité.
En outre, les répercussions sociales de l’excision ne sont pas négligeables. Les femmes excisées peuvent faire face à la stigmatisation, à la discrimination et à des tensions dans les relations familiales et communautaires, souvent exacerbées par des attentes culturelles. Ces effets délétères sur les relations familiales et communautaires soulignent la complexité de la lutte contre cette pratique.
Un cas récent met en lumière ces défis de manière poignante. La famille Diabaté, originaire de la haute Guinée, vit dans l’angoisse liée à cette pratique. Mory Diabaté et son épouse Fanta ont récemment révélé leur inquiétude concernant leur fille Sira Aris Diabaté, née le 26 septembre 2011, qui a été excisée de force à l’âge de 11 ans par sa tante pendant des vacances. Cette expérience traumatisante a profondément marqué la famille.
De plus, les parents expriment leur crainte pour leur seconde fille, Fanta Aris Diabaté, née le 7 août 2020. Mory Diabaté craint que, malgré les répercussions négatives, la tradition continue à exercer une pression sur la famille, certains membres justifiant cette pratique par des arguments fallacieux tirés de l’islam.
Selon les statistiques, la République de Guinée est le 2ème pays le plus touché par l’excision. En effet, 97 % des femmes de 15 à 49 ans sont excisées. Et contrairement à d’autres pays d’Afrique subsaharienne, cette pratique ne régresse pas.
La persistance de l’excision en République de Guinée malgré les condamnations croissantes des organisations de santé et des droits de l’homme souligne l’urgence d’une intervention plus profonde. Les efforts doivent se concentrer sur l’éducation, la sensibilisation et le soutien aux familles pour éradiquer cette pratique néfaste et offrir aux femmes et aux filles un avenir exempt de douleur et de discrimination.
Aboubacar SAKHO
Juriste-journaliste