À l’heure où l’UNESCO, les Nations Unies ainsi que le monde du journalisme à l’échelle internationale fêtent la Journée mondiale de la liberté de la presse, les journalistes et autres professionnels des médias s’inquiètent de leur situation. Quoi qu’ils peuvent se féliciter des progrès accomplis au niveau de l’exercice de leur fonction et le droit d’expression, pierre angulaire de toute société démocratique, fort est de constater qu’il reste beaucoup à faire dans ce domaine.
Aujourd’hui, face à la situation post Covid-19, suite aux multiples changements de regimes dans certains pays d’Afriqueet l’accentuation des conflits: Russie-Ukraine, Israël-Palestine,les crises au Sahel et qu’au Soudan ou en Asie, on note une absence globale d’amélioration de la situation des journalistes en général. Une situation dont certainsgouvernements plus ou moins autoritaires profitent de faire taire toute critique médiatique et au pire bafouer les libertésindividuelles.
Même si l’on célèbre depuis 1993 la Journée mondiale de la liberté de la presse, celle-ci s’enracine encore plus loin dans l’histoire des Nations Unies. Comme, il est stipulé, dans l’Article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’hommede 1948: «Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiétépour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informationset les idées par quelques moyens d’expression que ce soit.»
La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux car tout citoyen peut parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre à l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.
Petit rappel…
La Journée mondiale de la liberté de presse a été instaurée par l’Assemblée générale des Nations Unies en décembre 1993 après la tenue du Séminaire pour le développement d’une presseafricaine indépendante et pluraliste.
Ce séminaire s’est déroulé à Windhoek (Namibie), en 1991, et a conduit à l’adoption de la Déclaration de Windhoek sur la promotion de médias indépendants et pluralistes
La Déclaration de Windhoek exigeait l’établissement, le maintien et la promotion d’une presse pluraliste, libre et indépendante et mettait l’accent sur l’importance d’une presselibre pour le développement et la préservation de la démocratieau sein d’un État, ainsi que pour le développement économique. La Journée mondiale de la liberté de la presse est célébrée le 3 mai de chaque année, date à laquelle la Déclaration de Windhoek a été adoptée.
Aujourd’hui, dans le monde entier, le 3 mai est devenul’occasion d’informer le public à propos des violations du droit à la liberté d’expression et le moment de se rappeler que plusieursjournalistes risquent la mort ou la prison en transmettantl’information au public.
Aujourd’hui, la situation des journalistes est devenue de plus enplus inquiétante dans plusieurs de nos pays. C’estmalheureusement le cas en Guinée: depuis plusieurs mois les principaux médias audiovisuels (Hadafo Media, Djoma Media, Fim Fm, Evasion) sont victimes des brimades sans précédent: brouillage des ondes, retrait sur le bouquet Canal; à y ajouterdes arrestations des journalistes, suspension d’autres et des sites web.
Face à cette situation qui perdure, notre responsabilité en tant qu’observateur est de proposer des solutions pour une sortie de crise afin de créer des conditions idoines en faveur de la liberté de la presse.
Pour que l’on puisse parler de liberté de la presse, il faut qu’il y ait des médias pluralistes et des journalistes indépendants. Mais, comme le soulignent souvent les journalistes eux-mêmes et comme l’a rappelé un éditorial du Washington Post (International Herald Tribune), «Le fait d’être indépendant estdangereux dans de nombreux endroits du monde ». Et le danger ne vient pas seulement des gouvernements et des pouvoirspublics. Les conflits armés, la violence politique, les agissements de certains hommes d’affaires forts de leurs liens avec des prédateurs en Afrique sont eux aussi la source de la violence à l’encontre des médias.
Et c’est pourquoi ces journées du mois de Mai 2024 doiventêtre:
Des journées d’action, qui favorisent et permettent de mettresur pied des initiatives visant la défense de la liberté de la presse.
Des journées d’évaluation, afin de dresser la situation de la liberté de la presse en Guinée et à travers le monde.
Des journées de rappel pour rappeler à nos pouvoirs publics le respect des engagements qu’ils ont pris envers la liberté de la presse.
Des journées d’alerte pour alerter le public et accroître la sensibilisation à la cause de la liberté de la presse.
Des journées de réflexion pour stimuler le débat parmi les professionnels des médias sur les problèmes qui touchent la liberté de la presse et l’éthique professionnelle.
Des journées commémoratives en mémoire des journalistes qui ont perdu la vie pendant qu’ils exerçaient leur profession.
Des journées d’appui envers les médias qui sont victimes de mesures qui entravent la liberté de la presse.
On le sait tous, la liberté d’expression et son corollaire, la liberté de la presse, sont devenues un fondement indispensable des sociétés démocratiques. Dans certains pays développés, ceprincipe est tellement naturel que la journée mondiale de la liberté de la presse passe quasiment inaperçue. Cependant, dans nombre de pays moins lotis, où la liberté de la presse est au mieux fragile et au pire inexistante, le 3 mai donne aux journalistes et aux citoyens l’occasion de s’exprimer pleinementet librement.
La liberté de la presse est considérée comme une pierreangulaire des droits de la personne et comme une assurance que les autres droits seront respectés. Elle favorise la transparence et une bonne gouvernance et représente, pour la société, la garantieque régnera une véritable justice. La liberté de la presse est le pont qui relie la compréhension et le savoir. Elle est essentielle à l’échange d’idées entre les nations et les cultures.
Ensemble disons stop à la censure, au brouillage des ondes, aux menaces et d’intimidations envers les journalistes.
Ensemble, réclamons le retour immédiat des médias sur le bouquet Canal, etc.
Enfin, luttons pour que la liberté de la presse soit effective enGuinée et par tout ailleurs.
Joyeuse fête aux journalistes et vive la presse libre et indépendante.
Amadou Saikou Diallo
Washington DC