A qui profite le plafonnement du prix des denrées alimentaires ? [Mamy Keita]

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Le Gouvernement guinéen, à travers le Ministère du commerce, a annoncé le plafonnement du prix de certaines denrées alimentaires de première nécessité dont le riz, consommé à hauteur de 100 kg/habitant et par an. Si cet acte traduit le souci légitime des autorités de protéger les populations contre les effets pervers de la perturbation du marché international sur le prix de ces denrées, cette mesure risque cependant de peser lourd sur le budget alimentaire des ménages les plus pauvres.  

Ceci s’explique en partie par le fait que cette entrave au mouvement oscillatoire des prix, favorise l’installation de l’économie souterraine, terreau nourricier de la spéculation sur le marché et facteur de rebondissement des prix. Puis qu’il est généralement admis que les ménages à faibles revenus dépensent près de 80% de leurs ressources pour s’alimenter, l’on comprend aisément que cette disposition accéléra ce processus de drainage de ces ressources chez les ménages.

Pendant que ces couches laborieuses des villes et des campagnes se débattent comme elles le peuvent pours’offrir cette denrée, les spéculateurs, devenus entre temps, les maitres incontournables du marché, s’enrichissent démesurément. L’arrivée très prochainedes mois saints du carême et du ramadan,traditionnelles périodes de raidissement de la demande pour les aliments, suivie de la saison des pluies,moment d’effritement majeur du revenu des ménagespauvres, risque d’aggraver les conditions économiquespeu enviables de ces groupes sociaux dans cet environnement.

Historiquement, il est intéressant de rappeler que les tentatives similaires de stabilisation des prix des denrées alimentaires, entreprises par les gouvernements antérieurs, depuis l’indépendance nationale, ont plutôt produit leurs effets contraires, c’est-à-dire compromis les bonnes intentions de ces gouvernements d’offrir de meilleures conditions alimentaires à leurs populations. Ce fut par exemple le cas en 1964 sous la loi cadre ; en 1975 pendant la lutte contre ‘’Cheytane 75’’ ; en 2004 lors de la distribution du riz dans les quartiers de Conakry ; en 2010 á l’ouverture des magasins témoins, et ainsi de suite.  

Afin d’éviter ces situations aux conséquencesdommageables pour les couches vulnérables, les autorités actuelles devraient explorer d’autres mécanismes de stabilisation des prix qui prennent en compte les intérêts des acteurs présents sur la chaine des valeurs de la distribution des aliments de base. Ceci passe, en premier lieu, par la libération des prix dont les répercussions économiques et sociales profitent à chacun et à tous.

Mamy KEITA

Agroéconomiste á la retraite

Tel. 620 88 49 98

 

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