A la faveur d’une conférence de presse tenue ce mercredi 18 janvier, le Forum des Forces Sociales de Guinée (FFSG) s’est exprimé sur le déroulement de la transition, conduite par le colonel Mamadi Doumbouya, depuis 17 mois.
Dans un document, le FFSG a dénoncé plusieurs manquements des autorités dans la gestion de la transition.
Dans ledit document, le FFSG admet que les autorités de la transition ont violé 31 dispositions de la charte de la transition, des lois de la république, des libertés individuelles et collectives.
« Malgré l’acceptation de la Charte de la Transition, en signe de bonne foi par les Forces Vives de la Nation, que le CNRD a librement élaboré sans aucun consensus préalable avec les acteurs sociopolitiques du pays, 31 dispositions de ladite Charte ont fait objet de violation flagrante et manifeste par les responsables des organes de la Transition prescrits à l’article 36 de ladite Charte. A cela, s’ajoute la violation de l’ordonnance N°001 /2021 du 16 Septembre 2021 portant prorogation des lois nationales, conventions, accords et traités régulièrement approuvés par la République de Guinée, ainsi que plusieurs articles du Code Pénal de Guinée de novembre 2016. Interdiction systématique des manifestations publiques sans fondement, ayant entraîné des pertes en vies humaines, des blessés et destruction des biens publics et privés, sans compter l’expropriation brutale de certains citoyens des bâtis ou domaines considérés appartenant à l’Etat en dehors de toute procédure régulière, affectant des vies et la dignité humaine dans plusieurs familles de cadres qui ont passé toutes leurs vies au service de la nation sans plan de carrière », indique le document.
A travers son document, le FFSG soutient que de nombreux guinéens sont déçus de la lutte contre la corruption et la moralisation de la gestion publique de l’État engagées par les autorités de la transition.
« cette Lutte contre la Corruption et la moralisation de la gestion publique, a fini par créer une forte déception chez les Guinéens, laissant penser à un mécanisme de débrayage politique et d’intimidation d’anciens cadres de l’Etat qui constitueraient d’obstacles aux agendas du CNRD dans les privilèges du pouvoir. Il faut rappeler à titre d’exemple, que dès lors que le Procureur de la CRIEF est un magistrat du Parquet, il est évident qu’il est soumis à un principe hiérarchique et qu’il peut ainsi recevoir des instructions du ministre de la Justice contrairement aux magistrats du Siège. Rien n’empêche donc le CNRD, à travers son ministre de la Justice, de donner des injonctions au Procureur Spécial de la CRIEF. D’où le légitime sentiment d’instrumentalisation, à des fins politiciennes, de la volonté du peuple de Guinée à moraliser la gestion publique et limiter les effets de la corruption sur le développement du pays » souligne le document du FFSG.
Le FFSG souligne que le dialogue inclusif pour la recherche d’un consensus sur le contenu et la durée de la transition « n’a jamais été une préoccupation » des organes de la transition.
« le dialogue pour la recherche d’un consensus autour du contenu et la durée de la transition (l’article77 de la charte) et également pour le rétablissement de la confiance et l’esprit de tolérance comme prescrit au préambule de la charte entre les parties autour de la conduite de la transition, n’a jamais été une préoccupation des organes de la transition. Mais plutôt de simple stratagème pour gagner en temps et anéantir les acteurs sociopolitiques et mêmes les partenaires qui aspirent à un retour à l’ordre constitutionnel dans de meilleurs délais et le respect des lois et des droits », fait savoir le document.
Pour une sortie « heureuse » de la période transitoire, le FFSG propose les recommandations suivantes :
- La capitalisation des acquis de l’essai de dialogue inter guinéen tenu du 24 novembre au 21 décembre 2022 avec certains acteurs sociopolitiques du pays, comme un pas ayant permis de mettre en évidence deux (2) catégories de Guinéens, à savoir : une partie en accord sur la conduite de la transition composée du CNRD et certains acteurs sociopolitiques et une deuxième partie composée des partis politiques auxquels la grande majorité des guinéens ont accordé leurs suffrages depuis une décennie avec plusieurs organisations de la société civile et le mouvement syndical ;
- L’organisation rapide, au sens des recommandations du dernier sommet de la CEDEAO, d’un dialogue entre des représentants des deux (2) parties mises en évidence dans la recommandation ci-dessus ;
- Que les deux (2) parties conviennent en amont du mode de médiation/facilitation y compris les personnes qui conduiront le processus de dialogue en qualité de facilitateurs ;
- Le respect strict des dispositions de la charte, des lois de la République prorogées par l’ordonnance N°001 /2021 du 16 Septembre 2021 et les conventions/traités ratifiés par la Guinée, tout en tirant de façon juste toutes les conséquences de droit des violations de ces différentes lois et conventions ;
- La séparation systématique de la question du fichier électoral du recensement administratif à vocation d’état civil, afin de procéder à la révision intégrale (passage de tout le monde devant les CAERLE) du fichier électoral établi en 2020 sous la supervision de l’OIF et la CEDEAO sur la base des recommandations de l’OIF, l’UE et les NU en 2018, ayant fait l’objet d’un large consensus au sein de la classe politique avec le soutien de l’ensemble des organisations de la société civile intervenant sur les questions électorales ;
- Le transfert de l’organisation de toutes les élections à un OGE consensuel indépendant, utilisant l’expertise des Nations-Unies, de l’OIF et des autres partenaires techniques et financiers, compte tenu du manque de légitimité du gouvernement de la transition et la crise de confiance profonde entre l’administration publique et les acteurs parties aux élections.
Sadjo Bah