3 avril 84 : ‘’c’est la France qui a soutenu l’armée, distribué 20 000 dollars à chaque membre du CMRN’’ (Momo Bangoura)
3 avril 1984. Cela fait exactement 36 ans aujourd’hui que l’armée s’était emparée du pouvoir en Guinée. Dès après le décès du père de l’indépendance guinéenne dans les années 84, l’armée à travers le Comité Militaire de Redressement National (CMRN) et sous la houlette du feu général Lansana Conté, alors colonel, accède au pouvoir. Un coup d’Etat qui a eu pour conséquence la dislocation de toutes les institutions et industries du pays.
« La délégation française est venue distribuer au CMRN des enveloppes contenant chacune 20.000 dollars. C’était en octobre 1984. Mais la première demande c’était le retour de la Guinée dans la zone franc. La majorité des membres du CMRN était déjà d’accord pour ça, c’est le président Lansana Conté qui s’était opposé à ça »
Le doyen Momo Bangoura du PDG-RDA se souvient encore de ce jour qui mit fin aux 26 ans de règne de Sékou Touré. L’Homme y voit la fin d’une guerre entre la Guinée et la France déclenchée depuis le Non catégorique prononcé par la Guinée en 1958 afin d’accéder à son indépendance
« La date du 3 avril c’est la finalité d’une guerre que nous avons subie pendant tout le temps, toute la vie du président Ahmed Sékou Touré. Une guerre qui nous a été livrée par la France parce que nous avons voté « NON » le 28 septembre 1958. Et cela a eu comme conséquence la dislocation de l’empire colonial français en Afrique. La France ne nous a jamais pardonné ça. Maintenant toute la vie de Sékou Touré, ils ont tenté d’éliminer Sékou Touré, ils n’ont pas réussi à le faire. Impossible ! C’est pour cela c’est après sa mort que le gouvernement français a demandé à l’armée de prendre le pouvoir. C’est pourquoi l’armée a pris le pouvoir par ce coup d’Etat le 3 avril 1984 », a-t-il affirmé.
Une prise forcée du pouvoir ayant entrainé un changement de régime dicté par la France, et une chose en entrainant une autre l’armée supprima toutes les entreprises créées par le président Sékou Touré. Il s’agit là d’un « ajustement structurel ».
« Ça a été un changement de régime dicté par la France. Les Guinéens ont subi le changement. L’armée avait supprimé les entreprises créées par Sékou Touré, les industries à travers tout le pays. Ils ont appelé ça ‘’ajustement structurel’’. Les industries ont été supprimées. Je prends l’exemple à Conakry ici le complexe textile de Sanoyah, ce complexe textile-là était extraordinaire mais ils ont supprimé ce complexe. Je prends l’imprimerie Patrice Lumumba, les livres, les cahiers, le Sénégal venait chercher les cahiers des élèves ici, la Sierra Leone venait chercher les cahiers des élèves ici à l’imprimerie Patrice Lumumba, mais tout a été fermé, fermé, fermé », martèle le vieil homme.
Qui dit que la France a manqué son coup
« On n’en parle même pas. On n’en parle pas parce que la France elle-même dans son programme, elle a eu des déceptions parce que son premier objectif c’était le retour de la Guinée dans la zone franc, la zone CFA. Quand l’armée a pris le pouvoir, une délégation du gouvernement français est venue ici. Elle était conduite par le ministre de la coopération de l’époque, Christian Nincy. Il est venu ici rencontrer le CMRN (Comité Militaire de Redressement National). La délégation française est venue distribuer au CMRN des enveloppes contenant chacune 20.000 dollars. Chaque membre du CMRN avait son enveloppe et cela a eu lieu plus précisément en octobre 1984. Mais la première demande c’était le retour de la Guinée dans la zone franc. La majorité des membres du CMRN était déjà d’accord pour ça, c’est le président Lansana Conté qui s’était opposé à ça », rappelle-t-il.
Maciré Camara