Sory Camara déroule son plan d’assainissement : ‘’nous allons lentement mais efficacement parce qu’on ne veut pas échouer’’

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Créée par décret en novembre 2016, l’Agence Nationale d’Assainissement et de la Salubrité Publique (ANASP) multiplie les efforts en vue de rendre dans un premier temps, la capitale guinéenne propre. Dans cet entretien qu’il a bien voulu nous accorder, le directeur général, Sory Camara nous parle de la mission de son service, de la stratégie mise en œuvre pour rendre notre environnement propre et d’autres sujets non des moindres. Lisez !

Mediaguinee : Peut-on avoir une idée précise sur la mission de votre service ?

Sory Camara : Créée par décret D/2016/369/PRG/SGG du 30 novembre 2016, la direction générale de l’Agence nationale de l’assainissement et de la salubrité publique a été nommée par décret D/2017/008/PRG/SGG du 12 janvier 2017. En tant qu’établissement public à caractère administratif, la mission de l’ANASP consiste à appliquer la politique du Gouvernement en matière d’assainissement et de salubrité publique. Pour se faire, elle élabore les stratégies et projets, recherche des financements, noue des partenariats avec des opérateurs professionnels, signe des contrats dans le but de créer et d’entretenir durablement un cadre de vie au bénéfice des populations guinéennes. Il y a lieu de rappeler que la création de l’ANASP découle de la volonté de Monsieur le Président de la République, le Professeur Alpha CONDE, préoccupé de l’instauration durable d’un cadre de vie sain au bénéfice des populations aussi bien de Conakry que de celles des villes de l’intérieur du pays. Dès sa mise en place, l’ANASP a ouvert deux fronts : La réorganisation et l’amélioration des activités de collecte, de transfert à la décharge de la minière, ainsi que l’amélioration des conditions d’exploitation de la décharge de la Minière. Ainsi, le taux de collecte et de transfert des déchets à la décharge est passé en 2016 de 131 184 tonnes à 253 926,5 tonnes en 2018. Aujourd’hui, l’ANASP a atteint le taux de collecte et de transfert à la décharge de 68%. Ceci grâce à la contribution de 30 camions Mercedes offerts par Monsieur le Président de la République, le Professeur Alpha CONDE.

L’élaboration et la mise en place d’une stratégie qui vise à professionnaliser la gestion des déchets solides, autrement dit, il s’agit de confier les différents maillons, de la pré-collecte à mise en décharge en passant par la collecte, le nettoyage des rues et places publiques à des opérateurs essentiellement professionnels. Cette stratégie a été élaborée avec la collaboration du Cabinet Louis Berger, sur financement de l’Union Européenne. Ont contribué à l’élaboration, les départements ministériels impliqués concernés par l’assainissement, les autorités communales, les PME, la société civile et autres consultants. Elle a été adoptée le 10 mai 2019 par la session du comité interministériel sur les déchets solides présidée par Monsieur le Premier Ministre.

Quelles sont les différentes stratégies mises en œuvre pour vous permettre d’atteindre vos objectifs ?

J’avoue que nous avons une seule stratégie. Notre stratégie porte sur la professionnalisation de la gestion des déchets solides. En quoi consiste la professionnalisation de la gestion des déchets solides ? Vous savez, l’assainissement à Conakry était assuré d’abord par les PME au niveau de la pré-collecte, la collecte, le transfert et la gestion des décharges par l’Etat à travers la structure qu’on appelait avant, le Service Public de Transfert de déchets (SPTD). Alors, cette fusion des deux entités Privé-Etat a montré ses limites aujourd’hui. Vous savez, Conakry a une population de près de 3 millions d’habitants qui produit 1200 à 1300 tonnes de déchets par jour. Et lorsque vous voyez l’insuffisance des PME qui ne sont pas suffisamment rémunérées auprès des clients, lorsque vous voyez les insuffisances au niveau des points de regroupement qui ne sont pas très bien aménagés, lorsque vous voyez le manque de moyens matériels pour assurer le transfert des déchets auprès des points de regroupement à la décharge, lorsque vous constaté en même temps les véhicules qui sont insuffisants pour assurer tout ce travail et vous constater également la capacité limitée de la décharge pour une population de 3 millions d’habitants, vous comprendrez les disfonctionnements qui existent et qui justifient l’état d’insalubrité de la ville de Conakry. C’est donc pour résoudre tous ces problèmes que l’agence a fait l’état des lieux et s’est rendue compte que la nécessité qui s’impose pour réorganiser le secteur. Donc, notre stratégie repose sur ça. Autrement dit, la pré-collecte par les PME, la collecte, le transfert, la mise en décharge, le traitement de la décharge, la production d’électricité, tout cela, on doit confier à des opérateurs privés. Et de l’autre côté, nous allons développer la filière de valorisation des déchets. Voilà notre stratégie et nous pensons pouvoir réussir cette stratégie parce que, nous avons des partenaires fiables.

Qui sont ces partenaires qui vous appuient ?

L’ANASP bénéficie de l’accompagnement de deux partenaires techniques et financiers que sont l’Union Européenne et la Banque Islamique de Développement (BID). La BID dans la cadre du Projet d’assainissement de Conakry accompagne à hauteur de 54 millions de dollars destinés à l’achat d’équipements de collectes, de transferts et de gestion de la décharge. A ce titre, des appels d’offres relatifs à l’acquisition de ces équipements a lieu, les dépouillements sont en cours. Ils permettront l’acquisition de 220 bacs à ordures, 20 000 poubelles de famille ; 68 Camions, 2 bulldozers, 1 compacteur et 1 pont bascule. En plus, la BID interviendra dans l’aménagement de la décharge de la Minière, la réhabilitation de 56 km de canaux d’évacuation des eaux pluviales et de réhabilitation des boues de vidanges de Yimbaya et de Sonfonia. L’Union Européenne accompagne dans l’organisation de la pré-collecte, le renforcement de la capacité d’intervention des PME, de l’ANASP, et des autorités communales, l’aménagement des points de regroupements. Elle contribue également à l’aménagement du centre d’enfouissement de 100 ha BARITODE dans la préfecture de Coyah. Ce centre va remplacer la décharge de la Minière. Il sera aménagé, géré dans le cadre d’un PPP pour une période d’environ 30 ans pour y recevoir les déchets de la zone spéciale de Conakry, des préfectures de Coyah, Dubréka, etc. Les études sont déjà en cours dans la perspective du recrutement d’un opérateur sur la base d’un appel d’offre International. A BARITODE, les déchets seront traités pour produire le gaz et l’électricité.

Est-ce que ces partenaires ont effectivement mis les moyens à votre disposition ?

Déjà, l’Union Européenne a commencé par la réalisation d’un centre pilote à Kakimbo, je crois que vous avez dû suivre la pose de la première pierre des activités de réalisation de ce centre pilote. A l’image de ce point de regroupement de Kakimbo, nous allons réaliser un certain nombre de points de regroupement qui vont être aménagés et couvrir l’ensemble des communes de la capitale de manière à pouvoir créer les meilleures conditions de travail pour les PME qui vont évoluer dans les différentes zones. Ce travail-là a déjà commencé, l’Union Européenne est en train de travailler dans le cadre d’une commission mixte (agence nationale de l’assainissement, communes, gouvernorat et PME) pour mettre en place une structure qui va définir les méthodes et les modalités d’utilisation des points de regroupement qui vont être aménagés et mis à la disposition des PME. Voilà un peu l’appui de l’Union Européenne. La Banque Islamique de Développement quant à elle, va mettre en œuvre son appui à travers la réalisation de 56 kilomètres de voie d’évacuation des eaux pluviales, l’aménagement des points qui visent à viabiliser les services d’eau au niveau des communes de Matoto et de Ratoma. En plus, la Banque Islamique va nous accompagner également dans l’aménagement de la décharge de la Minière. Voilà un peu les domaines d’intervention de ces deux partenaires techniques et financiers. Maintenant, ce qui est important de savoir, c’est que pour la mise en œuvre de cette stratégie, nous avons lancé un appel d’offres international pour le recrutement de deux opérateurs professionnels. D’abord, pour la collecte, le transfert et la mise en décharge, le nettoyage des places publiques et le nettoyage des artères publiques. On a retenu déjà à l’issue de l’appel d’offres, la société Albayrak de la Turquie. Quant à la gestion de la décharge de la Minière, nous avons à l’issue de l’appel d’offres retenu Piccini qui va s’occuper de la gestion de la décharge pour une période de quatre ans. A l’issue de la période de quatre ans, nous allons fermer la décharge de la Minière et les opérations de traitement des déchets seront déportées au niveau du centre enfourchement technique qui est un domaine de 100 hectares, qui va recevoir les déchets sur la base d’un traitement qui nous permettra de produire le gaz et finalement de l’électricité.

Quel sera alors le rôle particulier des PME ?

Vous savez, les PME ont un rôle capital à jouer dans la mise en œuvre de la stratégie ? Je vous ai dit tout à l’heure que les différents segments de la chaine portent sur la pré-collecte, la collecte, le transfert et la mise en décharge. Les PME vont s’occuper de la pré-collecte au niveau des différentes communes. Nous avons déjà reparti Conakry en zones. Les PME évoluent dans ces zones et une fois qu’elles font la pré-collecte, elles vont transporter les déchets, les déposer au niveau des points de regroupement. C’est à partir des points de regroupement que l’opérateur professionnel retenu va rentrer en jeu. Mais pour que l’efficacité des PME soit durable, il faudrait que les populations acceptent de coopérer, il faut que les populations s’abonnent aux PME parce que les PME se font rémunérer sur la base des prestations qu’elles offrent aux différents clients que sont les ménages. C’est en cela que je voudrais profiter de l’occasion pour lancer un appel à vous les journalistes de nous aider pour sensibiliser la population pour qu’elle adhère d’abord à ce schéma, qu’elle contribue à faire en sorte que les abonnements auprès des PME soient effectifs pour que ces PME puisent jouer pleinement leur rôle. Déjà, l’Union Européenne s’est engagée à assurer la formation des PME, à les accompagner, à les encadrer et peut-être même à leur trouver des opportunités d’avoir des financements pour avoir des équipements capables de répondre aux nouvelles exigences de traitement de déchets dans le cadre de la professionnalisation. A cela, les PME ont un rôle capital à jouer. Ce qu’il faut retenir à ce niveau aussi, c’est que nous ferons en sorte que la responsabilité des communes soit déterminante dans le recrutement des PME, dans l’évaluation des PME et dans la sanction des PME. Parce que toute PME qui ne jouera pas pleinement son rôle, les responsables des communes auront la latitude de les faire remplacer par celles qui sont capables de faire face aux nouvelles missions que nous avons assignées aux PME dans le cadre de l’assainissement de la ville de Conakry.

Est-ce que votre service est représenté aujourd’hui à l’intérieur du pays ?

Pour le moment, nous sommes une agence toute naissante. Notre mission est d’abord concentrée sur Conakry, on veut que Conakry soit un modèle en termes d’assainissement et de salubrité et que Conakry soit un modèle pour l’ensemble des villes de Guinée. Et nous avons consacré ces deux premières années à définir nos stratégies et à nous atteler à sa mise en œuvre. Aujourd’hui, Dieu merci parce qu’il y a des lignes qui commencent à bouger. Vous avez constaté que la commune de Kaloum bouge déjà. La société Albayrak a déployé plus de 22 camions qui sont en train de sillonner les rues de Kaloum 24/24 et il en serait de même pour l’ensemble des 4 autres communes de la capitale parce que dans les semaines à venir, on va signer des contrats avec les deux autres sociétés. Donc, une fois ce travail terminé, nous allons maintenant redéployer nos activités au niveau d’abord des huit principales villes de l’intérieur du pays. Là également, nous allons mettre en place les mêmes schémas que Conakry. Nous voulons aller lentement mais efficacement parce qu’on ne veut pas échouer et pour ne pas échouer, il faut être prudent. C’est pour cette raison que nous avons décidé de concentrer d’abord nos efforts sur Conakry.

Quel message avez-vous à lancer pour la pérennisation de votre politique d’assainissement ?

Oui. Ce qui est important aussi, c’est qu’il faut que les PME se constituent bien, que les jeunes se retrouvent pour la valorisation des déchets. Vous savez, les déchets valent de l’or dans le cadre de l’économie circulaire. Les déchets peuvent générer des revenus importants et ils peuvent créer de la richesse. C’est en cela que je profite de l’occasion pour lancer un appel aux jeunes pour constituer des groupements d’intérêt économique. Parce que les points de regroupement qu’on va aménager et qui vont être financés par l’Union Européenne sont des zones de transit et de tri. Le tri, c’est pouvoir recueillir tous les déchets susceptibles d’être valorisés. Donc, une fois que ces jeunes se constituent au niveau de ces points de regroupement, ça peut générer des activités. Je voudrais que les jeunes s’inscrivent dans cette dynamique. L’objectif que nous recherchons, c’est de faire en sorte que toute cette activité de traitement des déchets soit assurée par nos jeunes professionnels pour que dans 10-15 ans, les sociétés qui sont là soient remplacées par des acteurs privés guinéens. Voilà ce que nous recherchons. L’assainissement est un effort collectif des citoyens. C’est pourquoi nous faisons appel à tous les citoyens pour convaincre l’insalubrité.

Réalisée Youssouf Keita

+224 666 48 71 30

 

 

 

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