Football guinéen : En déconfiture dans le pot au noir (Par Moïse Sidibé)

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Avant d’entrer dans le vif du sujet, il faut faire remarquer que George Weah a profité de sa visite d’Etat et de coopération en Guinée pour parler de son ami footballeur AKB (Abdoul Karim Bangoura) au champion en ‘’aile de pigeon loupé’’ de Guinée, et cela, au moment où le football guinéen est dans une mauvaise passe.

En 1995, un collectif d’une demi-douzaine d’entraineurs cochait l’équipe nationale locale, version Cabral, actuellement version CHAN, il y avait EL Kaba, Kallo Salifou Remether de Kindia, Ali Badara Kolev, La Valeur, Ousmane Pélé et si on ne se trompe pas, le tout nouveau Lappé Bangoura et bien d’autres. Cette équipe nationale des ’’ locaux’’ préparait la coupe Cabral, elle avait rencontré, en match de préparation, l’équipe communale scolaire de Ratoma, qui préparait la Finale de la coupe du général Lansana Conté contre l’équipe du Lycée-Bonfi, de Pascal Feindouno (je ne l’ai pas su sur le coup). AKB était le capitaine du Syli local.

En première mi-temps, impressionnés et tétanisés par les étiquettes des joueurs du Syli, qui n’ont rien de plus avantageux, nos élèves s’étaient fait battre par 3-0. On a apostrophé les joueurs : «  Vous avez peur de Quoi ! Ils ne courent pas plus vite que vous, ils ne sautent pas plus haut, ils ne frappent pas plus fort, ils ont les mêmes mollets de coq que vous ! Qui a peur encore ? Personne ! ont-ils clamé et ils ont mis 2 buts à l’équipe de AKB, en deuxième mi-temps. Le score était de 3-2. Nous les avions bouclés et dominés en fin de match. Celui qui cochait cette équipe scolaire n’était pas un footballeur attitré, il n’avait pas une licence d’entraineur, ce n’était qu’un simple enseignant comme un autre…

A cette époque, la question du brassard déchirait le Syli National entre le clan de Mohamed Sylla ‘’Socrates’’ et celui de Titi Camara. Avant la CAN de 1996, au Burkina, lors de la remise du drapeau, au Stade du 28 Septembre, la pression populaire avait obligé Lansana Conté et Koumba Diackité de limoger sine die les deux entraineurs Chérif Souleymane et Papa Camara… AKB gagnera bien plus tard sa place dans le Syli National comme joueur…

On ne doit pas se servir du football comme fonds de commerce pour faire de la politique ou pour faire de l’argent. Les désillusions de ceux qui l’ont essayé sont nombreuses, parce que les transports de joie et d’enthousiasme pour les victoires sportives sont éphémères. On se rappelle que Jacques Chirac débordé s’était écrié : Mesdames et messieurs, la France est championne de France… du monde ! Pour autant, ses déboires politiques étaient restés les mêmes. Emmanuel Macron, après le sacre des Bleus en Russie, n’avait pas pu éviter les difficultés politiques de continuer de plus belle. La question qui se pose aussi est de savoir si les footballeurs malgaches n’avaient pas été un tantinet plus plombés par la pression, et s’ils n’avaient pas voulu en faire un peu trop devant leur président, bien que leurs limites physiques étaient prévisibles, quand celui-ci a fait tout ce qu’il avait fait comme démonstrations à la tribune, en faisant aussi venir des milliers de supporters…

Le football guinéen, lui, est dans un pot au noir pour une tout autre raison. D’abord, la Guinée s’est fait éliminer lors du tournoi de la Francophonie d’Abidjan, alors qu’à égalité de point et de goal différentiel avec la Côte d’Ivoire, c’est celle-ci qui s’était qualifiée, personne n’a tenu compte de la victoire de la Guinée en confrontation directe, et aucun Guinéen n’a revendiqué pour faire respecter les règlements… Cette faiblesse guinéenne ne s’est pas fait attendre au CHAN du Maroc. Alors qu’un joueur soudanais n’était pas qualifié pour disputer le match contre la Guinée, bien que prévenus par les Camerounais, qui leur ont donné tous les détails de l’affaire, les responsables guinéens n’ont rien fait pour revendiquer leurs droits jusqu’à satisfaction, et comme si cela ne suffisait pas, voyant les faiblesses des guinéens, c’est au tour du Syli-cadet, qui s’était qualifié pour le Brésil, de se voir disqualifier par la CAF pour malversation sur la question d’âge. Pourquoi la CAF s’acharne-t-elle ainsi sur la Guinée ? Mais la chose reste à vérifier, car l’IRM n’est pas fiable à cent pour cent, à supposer que le scanner de la CAF soit sans reproche. Même si les Guinéens sont adeptes de ce genre de tricherie, la quasi-totalité des fonctionnaires guinéens ayant deux âges : un âge biologique et un âge administratif, l’écart peut faire tomber des nues, on insiste tout de même pour dire que l’IRM n’est pas toujours fiable. A l’adolescence, on avait un ami plus jeune de 4-5 ans, mais qui présentait un corps et un visage de vieillard. Si ce dernier passait devant le test IRM des Ahmad Ahmad, rien ne dit qu’il ne serait pas désigné plus vieux que son âge, mais bon… !

Ceci mis à part, comment ne pas parler de cette défaite voulue et arrangée face à l’Algérie. Les joueurs sélectionnés par affinité et par intérêt, par soucis de s’économiser et de se préserver, avaient joué pour eux et surtout à ne pas perdre le ballon, faisant des rétro-passes, évitant d’aller au contact, ne faisant aucune dangereuse incursion dans la surface de réparation adverse, combien de tirs cadrés ? On se trompe, peut-être, mais hormis une ou deux tentatives de Ibrahima Traoré, les autres étaient restés loin des buts du gardien algérien, qui avait passé une soirée sereine.

Les regroupements à l’extérieur, sources de dépenses inutiles, de magouilles et de malversations sont soutenus par une idée préconçue et fausse qui prône que celui qui n’a pas de club professionnel ne peut pas faire partie de la sélection nationale. Cependant, certains sans club pourraient faire mieux que les pros en activité dans certains grands clubs, il s’agit de  savoir les détecter. S’il y a tergiversation sur la sélection ou la non-sélection d’un joueur entre le président de la Fédération et le coach, c’est parce que la sélection et le regroupement ne sont pas faits à Conakry. Des matches-tests entre ce Syli sophistiqué contre la sélection du Syli du CHAN auraient donné une plus large idée sur ceux qui devaient représenter la Guinée au Caire. Les coaches ne sont pas tous infaillibles, on se demanderait toujours pourquoi Florent Ibengue laissait Meschack Elia sur le banc. Les joueurs de Lappé Bangoura se souviendront de son but au Rwanda… Ce joueur aurait fait gagner la RDC contre Madagascar, s’il était entré en jeu plus tôt, au vu de ce qu’il a montré dans le tard.

Dans le passé, le Syli allait se regrouper à Malaga, une station balnéaire d’Espagne, où les hôtels étaient désertés en hiver, entre décembre et mars. A cette période, le tarif des hôtels chutait de plus de 70%, voire plus. C’est à cette période, en décembre, que les Guinéens se regroupaient à Malaga avant de se rendre sur les lieux de compétition, en janvier. L’écart de température  était impressionnant. On a vu Michel Dussuyer avec le visage couperosé et bien mal en point, tous les joueurs étaient diminués, d’autres étaient malades par ce changement de température. C’était quand il avait fallu tirer au sort entre Guinéens et Maliens pour les quarts de finale, où les Guinéens fiévreux et fébriles s’étaient fait tabasser par la Ghanéens, comme dernièrement par les Algériens. Des malins faisaient facturer les tarifs des vacances d’été en hiver, cela leur permettait de faire venir des personnes qui n’avaient rien à voir avec le foot, sans compter ce qu’ils empochaient de cette surfacturation. Quant aux performances des joueurs après cette hibernation avant de venir au chaudron et dans la canicule, parfois jusqu’à 35-40 degrés, ils s’en balancent.

Et comme la Guinée est aussi riche que Crésus, même les matches amicaux perdus ont été payés gracieusement. Le président-paysan se laissait berner dans ce domaine, en son temps ; le président-professeur est en train de se laisser berner, à notre temps. Sans un nettoyage énergique de cette écurie d’Augias et un assainissement dans le milieu du football, beaucoup d’encre et de salive continueront de couler autour du ballon rond.

Moïse Sidibé

 

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