Les FSG mettent en garde : ‘’toute tentative de remise en cause de l’ordre constitutionnel actuel doit être considérée comme une déclaration de guerre…’’
Les Forces Sociales de Guinée (FSG) ont mis en garde lundi dans une déclaration lue devant les journalistes contre « toute tentative de remise en cause de l’ordre constitutionnel actuel par une minorité d’acteurs ». En intégralité, la déclaration lue par Abdouramane Sano…
« Toute tentative de remise en cause de l’ordre constitutionnel actuel par une minorité d’acteurs, doit être considérée comme une déclaration de guerre à la Patrie »
Les Huit (8) dernières années ont été tellement riches en événements et en enseignements, qu’il importe de faire une rétrospective sereine et objective sur cette période, pour en tirer les leçons au regard des immenses attentes des populations, par rapport à la présidentielle de 2010.
Ainsi, avec l’appui des partenaires au développement, les nouvelles autorités ont entrepris dès 2011 des réformes macroéconomiques ayant conduit en septembre 2013 à l’annulation de 60% de notre dette extérieure, soit plus de 2 Milliards de Dollars dans le cadre l’initiative PPTE. Les ressources budgétaires de l’Etat sont passé presque du simple au double, le dispositif législatif et réglementaire de la gestion du Budget et des ressources minières a été renforcé et le produit intérieur brut (PIB) a progressé de près du tiers entre 2016 et 2018 avec une croissance d’environ 5,8% en 2018, selon les estimations du FMI. De nouveaux mécanismes de sécurisation des recettes fiscales ont vu le jour en 2019 et un Plan National de Développement Economique et Social (PNDES) a été adopté en 2017, etc.
Depuis 2016, on observe un réel dynamisme dans les activités extractives, avec une augmentation exponentielle des volumes d’exportation de la bauxite et de l’or. Il faut noter, l’ouverture de nouveaux établissements dans le secteur des banques et assurances et un regain d’investissements privés dans les domaines de l’immobilier, de l’hôtellerie et de l’industrie manufacturière. Ce sont là des indices de la confiance suscitée dans les milieux d’affaires internationaux par la présidentielle de 2010.
En outre, des infrastructures stratégiques ont été réalisées comme le Barrage hydroélectrique de Kaléta, l’acquisition de nouveaux groupes thermiques améliorant la desserte en électricité à Conakry et dans quelques villes par rapport à 2009 et 2010. La construction en cours de Souapiti, l’atterrissage de la fibre optique, l’extension du Terminal à conteneurs du Port de Conakry, le prolongement de l’autoroute de Conakry à Coyah constituent d’autres réalisations. Il y a aussi des projets concourant à la restauration de l’image de l’Etat qui ont vu le jour avec la restauration ou la réalisation de bâtiments administratifs et sociaux dans plusieurs préfectures, dans le cadre de fêtes d’indépendance.
Cependant, ces réformes et investissements publics si salutaires qu’ils soient, ne peuvent occulter l’ampleur et le coût exorbitant des marchés de à gré à gré dont ils étaient l’objet qui font légion ? Doit-on sous-estimer l’incidence négative de ces marchés sur la viabilité et la qualité des projets concernés ? Ces réalisations peuvent- elles disculper la banalisation de la corruption et des détournements d’argent public, ou les scandales financiers régulièrement révélés, ainsi que les projets en souffrance assez courants ? Peuvent-elles excuser les bradages de patrimoines publics stratégiques ? Que de dire l’impunité qui a atteint une proportion jamais égalée ou de la justice muselée ? Toutes choses ayant affaibli les impacts promis.
Au plan politique et social, la période 2011-2018 aura été une très douloureuse expérience pour nos braves populations. Elles ont enduré d’épouvantables épreuves du fait d’une gestion politique et sociale chaotique due à la poursuite d’un ‘’système’’ de gouvernance qui a mis le Pays par terre, au cours des décennies précédentes. Ainsi, les guinéens qui aspiraient renouer dès 2011, avec la cohésion nationale et un développement économique et social, fondés sur les principes d’un Etat de Droit, ont malheureusement vite déchanté.
Cette déception s’aggrave avec la mauvaise gestion politique des blessures nées des crises sociopolitiques de 2010, l’inféodation des institutions républicaines, et la volonté de contrôler le processus électoral ainsi que les corps intermédiaires, dans un esprit d’affrontement. Le tout orchestré au détriment de la réconciliation nationale, du renforcement de l’Etat de droit et du progrès économique et social dont le contexte post-électoral offrait si généreusement l’opportunité à notre Pays. A cela s’ajoutent, la poussée de l’ethno stratégie et la banalisation du viol des lois par les autorités, les atteintes aux libertés de la presse, l’arrogance et la stigmatisation dans les discours officiels, les élections contestées, le déni de droit aux citoyens, la préférence de la répression (‘’ordre’’) à la loi, l’anéantissement des voies de recours, l’instrumentalisation de l’appartenance communautaire jusque dans les hameaux, la généralisation de la corruption et du mensonge d’Etat, etc.
Une situation préoccupante ayant généré des tensions et des conflits sociaux et politiques, d’autant plus facilement que les réformes et réalisations peinent à impacter positivement les conditions de vie de la société guinéenne. Bien au contraire ce sont les conséquences de la mauvaise gestion financière qui se font rapidement sentir en termes de détérioration des conditions de vie des travailleurs et des populations et d’aggravations des inégalités. D’où la montée des frustrations et des malaises sociaux, devenus de plus en plus grandissants, dans un contexte de sentiment généralisé d’injustice et de détérioration de la confiance des citoyens envers les représentants de l’Etat. Un cocktail de ressentiments sociaux incendiaires, qui risquent d’embraser le Pays à tout moment.
Une bien triste réalité, que le maquillage des données macroéconomiques officielles a du mal à occulter, lorsque :
- L’Organisation des Nations Unies, dans son rapport 2018, consacré à l’Indice de Développement Humain, au 175ème rang sur /189, nous classe comme le 15eme pays le plus pauvre au monde et comme le 13ème pays le plus pauvre d’Afrique. Ce que confirme un autre rapport relatif à la création de richesse dans le monde, qui classe la Guinée au 15ème rang des Pays de la planète qui contribuent le moins à la richesse mondiale, avec seulement 741$ us de PIB par habitant et par an, malgré la surexploitation de nos ressources minières ;
- Dans le classement mondial du magazine américain Forbes 2019, sur le climat des affaires, notre Pays se trouve parmi les plus mauvaises destinations pour les investisseurs internationaux, occupant le 151ème rang sur 161 Pays ;
- La Banque mondiale de son côté, dans son rapport 2019 sur le Doing Business, qui évalue chaque année le climat des affaires et sa qualité dans 194 Pays, nous place au 152ème rang, confirmant ainsi, notre constance dans la queue de peloton planétaire, en dépit de quelques performances réalisées par rapport aux trois dernières années ;
- Dans son rapport 2017 sur l’indice de perception de la corruption, qui concerne 180 Pays au monde, Transparency International révèle que la Guinée se classe au 148ème rang mondial et se retrouve ainsi parmi, les 20 Pays les plus corrompus d’Afrique. N’est-ce pas ce que révélait le rapport d’audit des marchés publics exigé par le FMI et commandité par le Gouvernement, lorsqu’il constate que 87% de ces marchés sont passés de gré à gré ? ;
- Une étude de la Banque Mondiale menée en 2017 sur les dépenses d’investissements révèle que les 67% des projets publics financés sur le Budget national n’auront pas fait l’objet d’une étude conséquente. Ce qui bien entendu pose le problème gaspillage de nos ressources financières ;
- Une étude d’une agence guinéenne indépendante de sondage indique que ‘’90% de guinéens ont manqué d’argent en 2017’’ pour certainement satisfaire un ou plusieurs de leurs besoins ;
- L’0rganisssation Internationale pour la Migration (OIM) indexe la Guinée, comme le premier pays de provenance de migrants originaires d’Afrique subsaharienne, en partance pour l’Europe. Avec 13 000 personnes recensées en 2018, on peut estimer à plus de 35 départs par jour, de jeunes guinéens, que le désespoir a poussé l’année dernière, sur le chemin de l’Europe, malgré l’enfer qui jonche cette dangereuse aventure. Il faut noter que ce chiffre ne concerne pas la migration de jeunes guinéens vers d’autres cieux ;
- L’agence COFIN, l’EIU (Economist Intelligence Unit), dans son rapport de 2018 relatif au classement de la Démocratie dans le monde, la gouvernance politique en Guinée se classe parmi les plus autoritaires de la planète, notre Pays occupant le 136ème rang mondial sur 165 et le 38ème rang des Pays africains sur un total 50. Soit parmi les 12 pays les plus autoritaires d’Afrique.
Ces irréfutables constats, pour la quasi-totalité, faits par des organismes internationaux indépendants, dont nul ne peut contester la notoriété et l’impartialité, correspondent parfaitement au vécu et au ressenti de nos populations. Ce sont ces défis sociaux, économiques et politiques pressants qui doivent préoccuper nos dirigeants et faire l’objet de nos priorités actuelles et non un projet 3ème mandat présidentiel que nul ne veut.
Réélu en 2015, pour son deuxième et dernier mandat, se dévoilait l’intention du Président Alpha CONDE de changer l’article 27 de la constitution relatif à la limitation du mandat présidentiel. C’était, à la suite d’une question posée par un journaliste alerte, le 15 mai 2016. La réponse présidentielle à cette occasion, ainsi que les déclarations, actes et faits qui ont suivi, ne laissent plus aucun doute sur le projet présidentiel au regard de l’assujettissement des institutions de la République au Pouvoir exécutif, la déstabilisation de la Cour constitutionnelle, la prolongation du mandat des députés et la propagande actuellement en cours.
Or, notre Pays est aujourd’hui à un tournant décisif de son histoire. Pour le Président Alpha CONDE et pour la Guinée, le tournant actuel demeure aussi une opportunité historique exceptionnelle. Bien géré, par le simple respect en 2020 des serments constitutionnels qu’il a faits, le Pr Alpha Condé revêtira à jamais le statut d’homme d’Etat et de démocrate que les guinéens aimeraient que l’histoire retienne de leur Président. Pour la Guinée, un tel acte, consacrera à jamais l’irréversibilité de notre marche vers de l’Etat de droit et l’unité nationale, dont la construction continue, encore et malheureusement, de coûter cher à notre Peuple. Nous exhortons le Président Alpha Condé à refuser toute tentation visant à remettre en cause l’ordre constitutionnel actuel et dont les conséquences peuvent constituer une menace pour la stabilité des institutions et pour la quiétude sociale dans le Pays et dans la sous-région.
Le projet de 3ème Mandat est une illusion suicidaire pour ses promoteurs, quelle que soit l’approche qui sera envisagée pour le réaliser. Car, non seulement il est à contre-courant de la marche monde, de l’histoire, mais des nobles aspirations de notre Peuple.
C’est pourquoi, nous interpellons :
- Le Président Alpha Condé, Président de la République, pour qu’il respecte ses différents serments solennels et qu’il évite à notre Pays les expériences regrettables connues ailleurs ;
- Les membres du Gouvernement et des institutions de la République, pour qu’ils demeurent fidèles à la nation et aux principes républicains exclusivement, en se réservant de toute complicité visant à trahir la Patrie en sapant la constitution actuelle ;
- La CEDEAO, l’UA, l’ONU, l’UE, afin qu’ils prennent dès maintenant des initiatives pressantes pour prévenir tout acte susceptible de provoquer des affrontements et l’instabilité des institutions en Guinée ;
- Les Pays amis et les partenaires pour qu’ils évitent toute ingérence visant à inciter ou soutenir tout projet aléatoire de modification ou de changement de la constitution de mai 2010 ;
Nous allons entreprendre sans délai, une large concertation avec tous les acteurs sociaux, politiques, économiques et religieux du Pays, ainsi qu’avec des citoyens engagés, en vue d’une évaluation sereine de la situation actuelle et de dispositions appropriées pour la défense à tout prix de la constitution guinéenne. Toute tentative de remise en cause de l’ordre constitutionnel actuel par une minorité d’acteurs, doit être considérée comme une déclaration de guerre à la Patrie.
Dans cet esprit, nous lançons un appel pressant à l’unité et à la mobilisation de tous les patriotes guinéens, afin de préserver notre Pays des conséquences imprévisibles du recul démocratique. Cet appel s’adresse à tous les patriotes guinéens, notamment aux :
- Citoyens vivant en Guinée et à l’étranger ;
- Acteurs de la société civile organisée et non organisée ;
- Syndicalistes et membres des organisations socioprofessionnelles ;
- Partis et acteurs politiques ;
- Jeunes et aux femmes organisés ou non ;
- Professionnels des médias et de la communication ;
- Universitaires, hommes de culture et artistes
- Religieux, leaders d’opinion ;
- Opérateurs économiques et membres des organisations patronales et consulaires ;
- Mouvements citoyens et citoyens engagés ;
- Cadres des administrations publiques et privées ;
- Cadres guinéens travaillant dans les institutions étrangères ou internationales ;
- Cyber-activistes et citoyens libres et patriotes ;
A vous toutes et tous, quel que soit votre lieu de résidence, surtout à l’élite intellectuelle dont le silence a déjà causé trop de tort à la nation, nous vous appelons à un sursaut patriotique national, en vue d’une mobilisation générale pour défendre la constitution contre l’imposture politique actuellement en cours. Nul guinéen patriote, épris de justice et de dignité, ne doit renoncer à la consolidation d’un Etat plus juste et d’une société paisible.
Unis pour défendre la Patrie !
Conakry, le 1er Avril 2019
La Coordination Nationale
Le Chargé des Operations
Ibrahima DIALLO