Voici ce qu’il faut pour réduire la mortalité néonatale, selon les spécialistes (vidéos)
«Nous rêvons d’un monde dans lequel la mort d’un nourrisson est d’une extrême rareté », a déclaré Dr Matthias Roth-Klener, Chef Service Néonatalogie de Lausanne (Suisse), lors d’une conférence de presse animée le 1er mai 2016 à Conakry.
Réduire la mortalité néonatale, c’est l’ambition de l’Institut de nutrition et de santé de l’enfant (INSE) . Accusé à tort ou à raison d’être responsable de la mort des nouveau-nés qui arrivent à son niveau, ce service public est confronté à de sérieux problèmes. C’est d’abord le manque d’équipements, mais aussi l’arrivée tardive des nouveau-nés.
Pour inverser cette tendance, l’INSE et la Faculté de Médecine de l’Université de Conakry ont invité Dr Matthias, chef du Service de Néonatologie de Lausanne en Suisse, qui a, par le passé, fait 25 ans en Guinée, notamment à Macenta. Objectif, appuyer le pays en matériels et en formation du personnel soignant.
C’est ainsi qu’une formation de trois jours a été organisée en faveur des sages-femmes, des pédiatres, des gynéco-obstétriciens et même des étudiants dans les thématiques de soins essentiels du nouveau-né, la réanimation du nouveau-né et les soins maternels Kangourou.
«Vous avez vu ce qui s’est passé récemment dans les journaux au sujet des enfants qui sont morts à l’INSE. Beaucoup vont mourir là-bas parce qu’un nouveau-né est fragile et ils viennent souvent là-bas tardivement. Il y a d’autres qui viennent qui se trouvent dans une situation très grave», a indiqué Pr Mamadou Pathé Diallo, Doyen de Chaire à l’Université de Conakry, avant d’expliquer qu’ils sont en train de trouver des solutions à ce retard du référencement des nouveau-nés à l’INSE : «[…] Alors qu’est-ce qu’on peut faire ? C’est peut-être faire en sorte qu’il en meurt moins. Il faut aller à côté de la mère du nouveau-né. Alors nous, nous commençons par les maternités où sont nés ces enfants. Avec la bonne volonté et la disponibilité de notre ami de Lausanne (Dr Matthias, ndlr), on est en train d’installer des équipements corrects à la maternité d’Igance Deen et surtout former le personnel. On est en train de chercher des solutions palliatives en attendant, en urgence, pour limiter les décès ou les maladies graves de ces nouveau-nés.»
28 mille décès néonatals en Guinée
Selon le Dr Matthias, en Guinée, il y a un peu plus de 400 mille naissances et chaque année environ 4 mille femmes décèdent au cours de l’accouchement. « Pour 100 naissances en Guinée, dit-il, trois à quatre enfants ne vivent pas les quatre premières semaines. Et le même nombre à peu près ce sont des fœtus qui ne vont jamais naitre vivants. Ce qui fait que pour 100 naissances, il y a peu près 7 morts. Si on cumule ça, ça fait 28 mille morts chaque année, chaque jour ça fait presque 80 morts. »
La prise en charge d’un nouveau-né, c’est une longue chaine
Après avoir passé 25 ans en Guinée au compte de l’Ong Médecins Sans Frontières, Dr Matthias Roth-Klener est revenu à Conakry en décembre 2015 avec une équipe médico-infirmière et technique.
Avec cette équipe, un constat a été fait. « On a réalisé qu’à l’INSE, souligne Dr Matthias, c’est la dernière partie d’une longue chaine de la prise en charge d’une femme, pendant la grossesse, autour de l’accouchement, du nouveau né qui est, après, amené à l’INSE pour la prise en charge. Ce n’est pas à la dernière partie seulement qu’on peut faire des améliorations. Il faut le faire plus tôt.» Il a insisté sur le fait que la prise en charge doit être faite depuis la conception de l’enfant, d’où par conséquent, il faut l’implication de tout le monde.
Conscient du manque criard d’équipements à l’Institut de nutrition et de la santé de l’enfant, Dr Matthias est venu de la Suisse avec des matériels, notamment un mannequin et un saturomètre.
«Dr Matthias a envoyé des mannequins, c’est-à-dire des modèles d’anatomie, pour la formation du personnel, parce qu’on ne peut pas former un prestataire en santé néonatale sans utiliser ces modèles d’anatomie. Parce qu’il faut former d’abord l’individu théoriquement et le former pratiquement sur ce modèle d’anatomie avant d’aller en salle d’accouchement. Il a envoyé un modèle qu’on n’avait jamais vu en Guinée ici. C’est le mannequin permettant de faire une formation sur les soins maternels Kangourou qui est une alternance à la couveuse. Vous savez, on a un problème de couveuse dans le pays pour son utilisation. Avec la méthode Kangourou, si on a la maitrise, on peut sauver des enfants qui ont des faibles poids», a expliqué le Directeur général adjoint de l’INSE, le Dr Ibrahima Diallo.
Le problème de l’INSE
Pour éviter que des nouveau-nés arrivent en retard au centre de prise en charge, l’INSE, en collaboration avec la Néonatalogie de Lausanne, a organisé une séance de formation de trois jours pour environ 45 personnes composées des sages-femmes, des pédiatres et des gynéco-obstétriciens. Cette formation qui s’est tenue à l’hôpital national Ignace Deen a concerné trois thématiques, notamment ‘’les soins essentiels du nouveau-né, la réanimation du nouveau-né et les soins maternels Kangourou.’’
Poursuivant ses explications, le Dr Ibrahima Diallo a fait savoir que le relâchement des nouveau-nés avec leurs mères constitue un des grands problèmes du centre de prise en charge.
«La salle d’accouchement d’Ignace Deen, a-t-il dit, fait au minimum 25 accouchements par jour dont plus de 9 à 10 césariennes par jour. La plupart de ces nouveau-nés ne sont pas consultés par un pédiatre. Ils rentrent à la maison. Le gros du problème qu’on a ce sont ces nouveau-nés qui sont relâchés avec leurs mamans pour le domicile et qui reviennent à l’INSE. Cette provenance du domicile à l’INSE nous pose problème parce que ce sont les parents qui constatent les signes de complication chez le nouveau-né. Quand celui-ci arrive, parfois c’est trop tard. On n’a qu’un ou deux jours de prise en charge et l’enfant meurt. Depuis le mois de juin à maintenant on a reçu 160 dépôts de corps. C’est-à-dire pendant la référence, le nouveau-né était vivant. D’ici qu’il n’arrive à l’hôpital, il est décédé. On ne peut que constater le décès. 160 nouveau-nés, c’est énorme en dépôt de corps.»
Le manque d’équipements, l’autre problème de l’institut
Le fait que l’INSE reçoit très tardivement des nouveau-nés venus des maternités ou ceux qui proviennent des domiciles ne constitue pas le seul goulot d’étranglement de ce service. L’autre grand problème, c’est le manquement d’équipements. Et l’aide du Dr Matthias est salvatrice, selon le DGA de l’INSE : «A l’INSE, on est sous équipés. L’un des apports que Dr Matthias nous a fait, c’est le saturomètre qui est un appareil qui permet de mesurer la saturation de l’oxygène chez le nouveau-né qui a besoin d’oxygène. Avec cet appareil, si on voit qu’un nouveau-né est bien saturé, on enlève et on donne à un autre. Quand il n’y a qu’un seul extracteur d’oxygène pour tous ces nouveau-nés là il faut vraiment un appareil pour mesurer la saturation en oxygène de ces enfants qui en ont besoin. C’est surtout eux qui posent problème parce qu’ils sont en train de souffrir, ils n’ont pas d’oxygène. Et le peu d’oxygène qu’il y a, si on ne le mesure pas on risque d’en donner trop ou moins.»
Le Dr Ibrahima note ensuite qu’il y a des programmes de formation des agents qui ont des structures sanitaires privées dans les quartiers.
BAH Alhassane
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