Enseignement Supérieur : le SNAESURS dénonce une ‘’main noire’’ du ministère de la Fonction Publique, frein à l’engagement des contractuels et enseignants-chercheurs
Le Syndicat de l’Enseignement Supérieur (SNAESURS) a annoncé hier vendredi, une grève de six jours à partir de mercredi prochain, dénonçant le non-respect par le Gouvernement de ses engagements, notamment l’application d’un décret signé en janvier 2024. Lors d’une interview accordée ce samedi, 02 novembre 2024 à Mediaguinee.com, Noumoukè Kanté, enseignant chercheur représentant du syndicat, a évoqué les inquiétudes face à des pratiques obscures dans le traitement des dossiers des homologues, avant d’appeler à une union sacrée des enseignants, condition sine qua non pour gagner le combat. Lisez!
Mediaguinee.com : Qu’est-ce qui justifie la décision du SNAESURS d’annoncer une grève de six jours à partir de mercredi prochain ?
Noumoukè Kanté : La décision repose sur un constat amer : le gouvernement n’a pas respecté ses engagements. Tous les points que nous réclamons sont déjà intégrés dans le protocole signé, mais depuis 2023, rien n’a été mis en œuvre. C’est ce manque de respect du protocole qui nous a conduits à déclencher un mouvement de grève pour six jours ouvrables et tacitement renouvelables et cela en accord total avec les membres de notre bureau exécutif, les présidents des coordinations et les secrétaires généraux des sections. Donc voilà ce que je pouvais dire concernant cette annonce-là.
Mediaguinee.com : En tant qu’acteur clé du dossier, pouvez-vous nous dire si le syndicat a eu des échanges avec le ministère de la Fonction publique à ce sujet avant cette annonce ?
Noumoukè Kanté : Oui, nous avons tenté de comprendre la situation. Récemment, le secrétaire général de la Fonction Publique m’a contacté pour discuter sur le cas d’un enseignant à l’Université de Sonfonia. Cependant, nous avons remarqué que le ministère de la Fonction publique a commencé à interroger les homologues sur leurs qualifications. Des questions comme à quelle institution ils appartiennent. Ou encore quelles sont les matières qu’ils dispensent ? Quel est le niveau de leur diplôme ? Nous nous pensons que cela soulève des questions, surtout que ces informations sont déjà dans leur base de données. Soupçonnant une manœuvre cachée derrière ces démarches, le bureau exécutif national s’est réuni et a décidé de demander aux homologues de ne répondre à aucune question de la part de qui que ce soit. Alors, c’est en cela, je crois, qu’hier, quand même, ils ont arrêté d’appeler les uns et les autres. Et franchement, le fait de se mettre à effectuer ces appels, nous a encore réchauffé le cœur. Parce que nous disons qu’il y a quand même une main noire derrière ce dossier-là, ce qui fait que jusque-là, ce n’est pas encore signé. C’est ce qui nous alors amenés à déclencher un mouvement de grève à partir de mercredi prochain. Mais je voudrais vous rassurer quand même que l’enseignement supérieur à date, a fait tout ce qu’il doit faire, et tout le problème se situe au niveau de la Fonction publique.
Mediaguinee.com : Il y a des rumeurs concernant des tentatives d’intégration de cousins et cousines sur la liste des homologues. Quelle est votre position à ce sujet ?
Noumoukè Kanté : Nous l’avons aussi appris, mais je peux vous assurer que ces rumeurs ne sont pas fondées. Nous avons vérifié la liste des homologues, et tous les noms figurant dessus sont bien ceux d’enseignants homologues qualifiés. Nous avons travaillé en transparence avec la Fonction publique pour garantir l’intégrité de cette liste. Parce que le projet d’arrêté, je vous avais dit ça à un moment donné, qu’il y avait certains noms qui ont été mal saisis. Sinon les 827 homologues, il y avait leur nom, il y avait leur filiation, il y avait tous les renseignements offerts, les diplômes et tout ce qui s’ensuit. Mais dire qu’il y a quelqu’un de la Fonction publique qui aurait tenté d’infiltrer des gens sur la liste, je l’ai dit personnellement aux ministres; que très honnêtement, nous ne pouvons infiltrer quelqu’un là-dessus, mais je ne crois pas aussi que quelqu’un a pu infiltrer qui que ce soit là-dessus. Parce que nous, personnellement, avec le Directeur général de la Fonction publique la fois dernière, nous avons revu, de A à Z, en présence même du secrétaire général. Et, tous les éléments qui sont là sont effectivement des enseignants dans les universités. On n’a vu personne qui aurait appartenu à une institution, mais qui ne serait pas sur la liste. Tous ceux qui étaient sur la liste étaient vraiment des homologues, à moins qu’il y ait deux listes. Sinon, la liste que nous avons vue, franchement personne n’a été infiltré là-dessus.
Mediaguinee.com : Que pensez-vous de l’arrivée des enseignants de l’étranger pour combler le manque de PHD en Guinée ? Cela pourrait-il affecter le processus d’engagement des homologues ?
Noumoukè Kanté : Je ne pense pas que cela retarde le dossier des homologues. Les 877 enseignants concernés sont tous Guinéens, et l’intégration d’experts étrangers peut être bénéfique si ces derniers sont qualifiés. Cependant, cela ne doit pas se faire au détriment des engagements envers nos propres enseignants. Quand il y a un problème, il faut sortir hors du cadre logique pour trouver quelquefois la solution. C’est vrai qu’il y a moins de PHD en République de Guinée, comparativement à certains pays. Je pense que vouloir chercher, en tout cas, d’autres enseignants ayant le PHD dans d’autres pays pour venir épauler, je ne vois pas que ça soit quelque chose de mauvais. Ça ne peut-être qu’un apport. Mais ce serait quand même que ceux-là qui viennent, aient l’expertise, la connaissance et le bon sens d’enseigner(…). Très honnêtement, ce n’est pas ce qui fait retarder le dossier des homologues.
Mediaguinee.com : Quel message souhaitez-vous faire passer aux enseignants-chercheurs face à cette situation ?
Noumoukè Kanté : Je les appelle à la solidarité. Les revendications du syndicat concernent tous les enseignants : le reclassement, l’application du décret, et bien d’autres enjeux. Nous devons rester unis durant cette grève de six jours. Et si l’État ne répond pas, nous serons contraints de prolonger notre mouvement. La division ne sert que ceux qui ne souhaitent pas voir le système éducatif évoluer. Je demande à tous les enseignants chercheurs de suivre le mot d’ordre de grève durant les six (6) jours ouvrables. Ils n’ont rien à gagner dans la division, que tu sois quelqu’un qui a aimé l’enseignement supérieur ou que tu sois enseignant chercheur, je demande à tout le monde de s’unir comme un seul homme pour gagner ce combat-là.
Entretien réalisé par Sâa Robert Koundouno