Des dizaines de migrants africains ont été chassés de la ville tunisienne de Sfax qui a connu une nouvelle nuit de violences après la mort d’un habitant dans des heurts, selon des témoignages.
Dans plusieurs quartiers de cette grande ville du centre-est de la Tunisie, des centaines d’habitants se sont rassemblés dans la nuit de mardi à mercredi dans les rues réclamant le départ immédiat de tous les migrants clandestins, selon un correspondant de l’AFP sur place.
D’autres montraient des migrants à même le sol, les mains sur la tête, entourés par des habitants munis de bâtons qui attendaient l’arrivée de la police.
Sur la page Facebook du groupe local Sayeb Trottoir, dédié à la question de l’immigration clandestine, Lazhar Neji, travaillant dans les urgences d’un hôpital de Sfax, a déploré « une nuit inhumaine (…) sanglante ».
Selon lui, l’hôpital a accueilli entre 30 et 40 migrants, parmi lesquels des femmes et des enfants. « Certains ont été jetés de terrasses, d’autres agressés avec des sabres », a-t-il affirmé.
Le Forum des droits économiques et sociaux (FTDES), qui suit les questions migratoires, et plus de 20 autres ONG tunisiennes et internationales, ont affirmé dans un communiqué conjoint que les forces de sécurité avaient emmené mardi un « groupe de 100 personnes migrantes et réfugiées » de la région de Sfax vers la frontière libyenne.
« Le groupe comprend plusieurs nationalités notamment ivoiriennes, camerounaises et guinéennes dont au moins 12 enfants âgés entre six mois et cinq ans », selon la même source.
Une cinquantaine d’autres migrants avaient été conduits vers la même région le 2 juillet.
Certains d’entre eux ont été « battus et maltraités », ont ajouté les ONG, qui ont appelé les autorités à « donner des clarifications sur ces faits et d’intervenir en urgence pour assurer une prise en charge de ces personnes ».
« Il y a un problème sérieux à Sfax, il y a un Subsaharien qui a tué un Tunisien et du coup la population tunisienne est fâchée contre tous les Subsahariens et s’attaque à eux, et même la police tunisienne essaye d’arrêter illégalement tous les Subsahariens, pour les refouler dans le désert de la Libye », a déclaré à l’AFP l’un deux, Jonathan Tchamou, un jeune congolais.
« On a vraiment peur d’être ici, c’est pour ça qu’on veut quitter à tout prix Sfax », a ajouté M. Tchamou, affirmant être venu en Tunisie d’une manière régulière avec un visa d’étudiant.
« Avant la Tunisie était un pays d’accueil pour nous, on vivait à l’aise ici mais comme maintenant nous ne sommes pas les bienvenus, la solution serait de traverser la Méditerranée pour aller en Europe », a-t-il poursuivi.
Les tensions entre les habitants et les migrants se sont exacerbées après un discours en février du président Kais Saied pourfendant l’immigration clandestine et la présentant comme une menace démographique pour son pays.
La plupart de ces migrants viennent en Tunisie pour tenter ensuite de rejoindre l’Europe par la mer, en débarquant clandestinement sur les côtes italiennes.