Tabaski à Kankan : la Mamaya tire son origine au Mali et porte le nom d’une femme (président des Sèdès auprès de la notabilité)

Au lendemain de chaque  fête de Tabaski, les Kankanais organisent une cérémonie culturelle dénommée Mamaya. Cette  pratique est une danse classique traditionnelle qui fait l’harmonie et la fierté des Maninka Mory de Kankan et du Bâté en général.

Elle est organisée par une entité sociale appelée Sèdè après avoir reçu une attribution de la notabilité.

Les Sèdès sont au nombre  de cinq (5) : Sèdè Sandyaya, Sèdè Heremakonoya, Sèdè   Doudyaya, Sèdè Diamanadyaya, et Sèdè Dandyaya.

Créés en 1770 par M’bemba Alpha Kabinet, les Sèdès   s’occupaient de l’organisation de la cité jusqu’en  1936 -1937 pour le démarrage de la Mamaya.

Au cours d’une interview, Elhadj Mohamed Lamine KABA dit RINGO, conseiller et président des Sèdès auprès de la notabilité est revenu sur l’origine et l’importance de la Mamaya.

Selon notre interlocuteur, au départ, les sages de Kankan n’étaient pas d’accord pour l’organisation de la Mamaya à cause de l’islam. Il a fallu des plaidoiries pour changer l’avis des sages. Ils ont accepté en fixant des principes à respecter notamment :

Il ne faut pas faire la Mamaya pendant les heures de prière (c’est pourquoi ça démarre après la prière de 16 heures, suivi des pauses lors de la prière du crépuscule et de la dernière prière du soir, puis la reprise à 20 H);

La Protection des femmes (raison pour laquelle, lors de la danse, les femmes sont toujours au milieu du cercle, c’est une sorte de protection) ;

La protection corporelle (habillement correct de tous et toutes des habits de la Mamaya).

Les organisateurs de la Mamaya respectent strictement  les principes dictés par les sages.

Parlant de l’historique, le président des Sèdès dit que la Mamaya tire son origine du Mali, elle a été importée par des  commerçants. Au Mali, elle s’appelait Bondon.

« A l’ origine, la Mamaya est importée du Mali BAMAKO. Nos aînés qui voyageaient  dans le cadre du commerce, c’est eux qui  l’ont importée. Mais à l’origine, ça ne s’appelait pas Mamaya, il y avait un autre nom que les fondateurs ont donné. Il s’appelait  Bondon. Bondon, c’était un élément du folklore et des traditions du Mali. », rappelle-t-il.

Les Sèdès se sont réunis après l’acceptation des sages et la réglementation de la Mamaya, pour  la composition d’une chanson concernant cette danse. Une dame du nom de MAMA sera toujours présente au cours de la répétition de cette musique, les artistes ont chanté son nom  suite à sa revendication en disant  MAMA est là (MAMA Y AN, en langue nationale malinké).C’est ce nom qui devient par déformation linguistique Mamaya.

« Selon la tradition, dès le feu vert des sages pour l’organisation de la mamaya, il fallait composer une chanson concernant cette danse. La répétition se faisait chez la famille Siridou en présence de cinq Sèdès précédemment énumérés. Il ont fait cette composition musicale en citant les noms des différents  Sèdès. Il paraîtrait, qu’il y avait une femme qui venait à cette répétition qui observait, elle entendait les noms de gens sauf elle. Elle était méconnue de tous. Un jour, elle a levé le ton en parlant d’un choix sélectif dans cette musique, j’entends tous les jours des nouveaux noms qu’on introduit dans cette chanson et moi qui  suis-je là tous les jours ?

Vous me regardiez et continuez la répétition, je n’ai jamais entendu mon nom.C’est qu’elle avait dit était palpable. Ils ont dit oui c’est vrai. Quel est votre nom ?

La femme a répondu MAMA, pour préciser que Mama est là,ils disent dans la musique MAMA Y AN, c’est-à-dire Mama est là. »,  explique  le conseiller en partant d’une narration transmise de génération en génération.

En termes d’impact sur le développement social et économique, les Sèdès ont déjà construit 42 salles de classes, une chambre froide à l’Hôpital Régional de Kankan, l’adduction d’eau à l’Hôpital Régional, une cinquantaine de forages ainsi que plusieurs autres infrastructures dans la région et même à Conakry à  travers les revenues de cette rencontre festive.

Chaque Sèdè organise durant cinq ans et cette année  c’est le Sèdè DANDYAYA  dont le colonel Mamadi DOUMBOUYA, président de la transition est membre. Les festivités démarrent ce  jeudi 29 juin 2023 dans l’arène du nouveau site flambant neuf construit à l’ex aéroport.