Alice Frank-Stock, aujourd’hui âgée de 102 ans, a vécu dans le même immeuble que le dictateur allemand dans les années 1920 et 1930. Elle se souvient d’avoir vu un cercueil sortir de l’appartement du leader nazi. Juive, elle a dû fuir l’Allemagne en 1935.
Alice Frank-Stock était une jeune adolescente quand Adolf Hitler a fait l’acquisition d’un appartement dans son immeuble, situé sur la Prinzregentplatz de Munich. À l’époque, le futur dictateur venait juste d’avoir été libéré de prison à la suite d’une tentative de coup d’État ratée.
Peur pour sa sécurité
“Je ne lui ai jamais parlé”, se souvient Alice. “Je l’ai vu une ou deux fois rentrer à la maison. Sa voiture s’approchait de l’entrée puis deux SS sortaient de chaque côté et il se précipitait vers la maison. Il avait terriblement peur de se faire tuer”.
La relation entre Hitler et sa nièce
Hitler partageait l’appartement avec sa nièce Geli Raubal, avec qui il a eu une relation ambiguë. À ce sujet, Alice Frank-Stock se souvient surtout du jour où Geli Raubal est sorti de l’immeuble les pieds devant, dans un cercueil. Nous étions en 1931. “Nous avons entendu beaucoup de rumeurs”, raconte Alice. “Nous ne savions pas comment elle était morte et vous ne pouviez pas parler ouvertement”. Certains ont dit que la jeune femme de 23 ans s’était suicidée. Beaucoup affirment que c’est son oncle qui l’a tuée.
Hitler a continué à vivre dans cet appartement jusqu’à ce qu’il devienne Führer en 1934. Après cela, il a déménagé à Berlin, mais il a conservé l’appartement. C’est là qu’il a reçu le Premier ministre britannique Neville Chamberlain en 1938. L’immeuble a été saisi par les forces alliées à la fin de la Seconde Guerre mondiale et est aujourd’hui le siège de la police régionale de Munich.
La fuite vers Londres
En 1935, parce qu’elle était juive, Alice a dû fuir vers la Suisse. Elle avait 17 ans. Son père, qui était juge à la Haute Cour, a été contraint de prendre sa retraite. En 1937, Alice est partie pour Londres sans ses parents. “Le lendemain de la Nuit de Cristal, une amie de mes parents leur a téléphoné pour leur dire que son mari avait été emmené dans un camp de concentration”, raconte Alice. Le couple a alors réussi à prendre un des derniers trains pour l’Angleterre, deux jours avant le début de la Seconde Guerre mondiale. Pour payer le droit d’entrer au Royaume-Uni, le père d’Alice a dû vendre un violon vieux de deux cents ans. La somme à payer à l’époque était de 1.200 euros.
Alice a ensuite travaillé pour la BBC et l’Organisation de coopération et de développement économiques. Pendant la guerre, elle écoutait les émissions radios de son pays natal et signalait tout ce qui était digne d’intérêt à ses supérieurs.
“J’ai eu une belle vie”, conclut Alice. “Je vous conseille de faire beaucoup de marche et de randonnée, avec un verre de vin rouge de temps en temps”.