Violation des droits humains : 70 manifestants et au moins 3 agents tués de 2015 à 2019 (Amnesty International)
Au cours d’une conférence de presse animée ce mercredi, 13 novembre, Amnesty International a procédé à la publication de son rapport intitulé : ‘’ Guinée. Les voyants au rouge pour les droits humains à l’approche de l’élection présidentielle’’. A cette occasion, l’organisation a appelé les autorités guinéennes à remédier aux violations des droits humains qui, selon elle, se multiplient, notamment les homicides de manifestants, les interdictions de rassemblement pacifiques et la répression des voix dissidentes, risquant de s’aggraver à l’approche de l’élection présidentielle de 2020.
Dans ce rapport, Amnesty International met en garde contre la montée des tensions politiques, dans un contexte où les craintes sont vives que le président Alpha Condé ne modifie la Constitution pour briguer un troisième mandat. De nombreuses tueries des manifestants par les forces de sécurité, dont la mort d’un enfant de sept ans, au règne de l’impunité en Guinée, en passant par la répression contre les défenseurs des droits humains et les conditions carcérales déplorables expose la situation dégradante des droits humains en Guinée entre janvier 2015 et octobre 2019, et dénonce l’homicide de 70 manifestants et passants (dont 59 des victimes semblent avoir été tuées par la police et la gendarmerie ) et d’au moins 3 membres des forces de sécurité, des journalistes ciblés et 109 morts en détention.
« Guinée : les voyants au rouge à l’approche de l’élection présidentielle de 2020, d’abord parce que les manifestations sont régulièrement réprimées que ce soit à Conakry ou l’intérieur du pays. Ensuite, les personnes qui expriment une dissidence sont régulièrement arrêtées ou assujetties sous forme d’harcèlement judiciaire et d’autant plus grave que les établissements carcéraux sont très mauvais. Et du coup étant en détention c’est sous forme de violation des droits humains. Enfin il y a la question de l’impunité puisque les autorités reconnaissent difficilement, voire pas leur responsabilité quand il y a des décès dans les manifestations. Il y a très peu de cas de personne qui sont décédées dans les manifestations qui ont été à la justice », explique François PATUEL, chercheur Afrique de l’Ouest à Amnesty International. « Une des recommandations que la Guinée avait reçues en 2015, c’était d’abolir la peine de mort. Alors là on constate que c’est quelque chose qui est faite. La deuxième chose que la Guinée a faite qui est positive c’est de criminaliser un certain nombre d’éléments dans le code pénal de 2016 », ajoute-t-il.
Ce rapport de Amnesty International évalue la situation des droits humains depuis l’Examen Périodique Universel (EPU) de janvier 2015.
« Ce rapport s’inscrit dans le cadre de l’examen périodique universel de la Guinée prévu en janvier 2020 à Genève. Comme vous le savez l’examen périodique est un processus unique à son genre. Il consiste à passer en revue les réalisations de l’ensemble des États membres des Nations Unies dans le domaine des droits humains (…). Les organisations de la société civile et les organisations internationales comme nationale ont l’opportunité dans ce processus de présenter des rapports. Et c’est dans ce cadre qu’Amnesty international a publié ce rapport », estime Kiné-Fatim DIOP, Chargée de Campagnes Afrique de l’Ouest.
Dans ce même rapport, Amnesty a soumis des recommandations à l’Etat guinéen. Il s’agit entre autres de la modification de la législation encadrant l’usage de la force et les réunions, notamment le Code pénal, la loi de 2015 sur le maintien de l’ordre et la loi de 2019 relative à l’usage des armes par la gendarmerie ; du retrait des forces armées des lieux de manifestations et la publication immédiate des informations sur les conditions de leur déploiement ; la fourniture aux forces de l’ordre des ressources suffisantes et d’u équipement adéquat pour maintenir l’ordre dans le cadre de manifestations ou de contre-manifestations de grande ampleur ; veiller à ce que tous les véhicules et équipements antiémeutes indiquent des informations claires permettant de les identifier ; mener sans délai des enquêtes impartiales, indépendantes et approfondies sur toutes les affaires dans lesquelles les forces de sécurités ont fait des morts ou des blessés en ayant fait un usage injustifié ou excessif de la force ou infliger des sanctions disciplinaires et pénales, selon le cas, à toutes les personnes soupçonnées d’être responsables, y compris les supérieurs hiérarchiques ; veiller à ce que les observateurs des manifestations, notamment des journalistes net des défenseur-e-s des droits humains, soient protégés et ne subissent pas des arrestations arbitraires ou des actes de violences, y compris par les forces de sécurité.
Maciré CAMARA
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