« Le patriotisme est la source du sacrifice, par cette seule raison qu’il ne compte sur aucune reconnaissance quand il fait son devoir » Louis Kossuth.
En commençant ma tribune par cette citation emblématique de Louis Kossuth, je voudrais me faire le devoir de parler en quelques mots, les qualités intarissables d’un homme qui, au prix des valeurs qu’il a, et continu de défendre pour son pays lui ont valu respect et considération.
Ainsi, loin de faire l’éloge du prince, la rédaction de cette tribune s’est imposée en moi comme une obligation morale envers un des rares intellectuels de notre pays, en l’occurrence M. Mohamed Camara (Enseignant chercheur, consultant-médias et ancien chef de cabinet du ministère des affaires étrangères et des guinéens de l’étranger).
Pour la petite histoire, j’ai commencé à suivre ses dans les amphithéâtres de l’Université Général Lansana Conté de Sonfonia-Conakry. A l’époque, j’y étais un étudiant en licence trois (département Sciences politique). En réalité, nous étions tous fascinés par la clarté de ses interventions. C’était quelqu’un que je voulais toujours écouter.
Puis, dans les médias, en dépit du rang qu’il occupait dans l’administration, son humilité et son patriotisme forçaient notre admiration. Son sens élevé du débat et son objectivité étaient aussi un des éléments de notre attachement à sa personne.
En effet, ses prises de position ont démystifié le débat juridique dans non seulement au sein de l’opinion nationale, mais aussi dans le paysage médiatique du pays. En fait, il était pour moi, l’intellectuel qui disait le droit, pas pour soi, mais pour les autres ; l’intellectuel qui intervenait contre parfois certaines manœuvre de l’Etat y compris d’autres apprentis sorciers du droit.
A la fin de mon cycle universitaire, nous avons continué à entretenir de très bonne relation. Il est devenu à cet effet, un mentor et un guide pour moi, y compris pour de nombreux autres étudiants de toutes facultés confondues. Il était toujours là, disponible et généreux.
Quelques années plus tard, il a été nommé Chef de cabinet du Ministère des affaires étrangères et des guinéens de l’étranger par le Président de la République, dans un contexte dominé par le débat autour du changement de la Constitution.
Etait-il contraint d’accepter cette énième confiance du Chef de l’Etat ? Cette nomination avait-elle pour but de l’arracher son franc-parler ? Qu’est-ce qui justifiait son silence, en dépit du fait qu’il soit interpellé par l’opinion nationale ?
En effet, le juriste publiciste a bénéficié de la confiance du Président, le mercredi, 01 avril 2019 en lui nommant chef de Cabinet au Ministère des affaires étrangères et des guinéens de l’étranger. Cette nomination a été perçue comme une manœuvre du Chef de l’Etat de faire taire toutes les voix dissidentes au sein du cercle restreint des juristes constitutionnalistes.
Au cours de la cérémonie de passation de service, le nouveau promu nous a laissé entendre ceci : « Je remercie surtout Son Excellence Monsieur le Président, Chef de l’Etat, Pr Alpha Condé pour m’avoir nommé à des postes de responsabilité par trois fois de suites…Je travaillerai dans un esprit d’équipe, dans le respect de la hiérarchie, la loyauté, la sincérité, l’honnêteté, en préservant autant que possible les valeurs et les principes conformément à la législation en vigueur ».
A bien des égards, malgré l’interrogation de bon nombre de guinéens sur sa nomination dans cette nouvelle fonction, l’Universitaire, a, de par son propre gré accepté de servir encore une fois son pays dans le strict respect de la loi.
Tout le temps que nous lui avons côtoyé au Ministère, sa main n’a jamais tremblé en prenant une décision ou même en se prononçant sur un sujet qui engage l’Etat guinéen. Il a toujours su mettre l’intérêt du pays devant le sien : « Aly Souleymane, ne sois jamais complaisant en disant la vérité », m’a-t-il dit au cours d’une de nos conversations. Bref, il a toujours servi le pays en ne tenant pas compte des humeurs de qui que ce soit.
Cependant, qu’est-ce qui justifiait son silence ? Certains diront qu’il avait donné sa langue au diable ; d’autres même diront qu’il avait peur de perdre son poste de Chef de cabinet.
Mais en réalité, aucune de ces allégations n’avait à avoir avec les valeurs que l’homme défendait. Par contre, il nous laissait entendre ceci : « Chaque étape de la vie d’un homme, a ses obligations. Pour l’heure, la fonction que j’occupe exige en moi, des obligations de réserve et de neutralité ». Certes, il est très difficile dans le contexte guinéen, de comprendre sa décision au lendemain de sa prise de fonction. A ce propos, il n’a jamais voulu être « l’intellectuel médiatique », comme ce que souhaitent beaucoup de personnes au regard du débat qui domine l’actualité sociopolitique de notre pays.
Contre toute attente, il a été remplacé dans ses fonctions par M. Pierre Sény Fofana ce mercredi, 27 novembre 2019. Qu’est-ce qui justifie ce nouvel choix du Chef de l’Etat ? Dit autrement, s’est-il servi de Mohamed Camara ?
Par rapport à la première question, seul le Chef de l’Etat qui, à travers son pouvoir discrétionnaire peut nommer, qui il veut ; donc il nous serait très difficile de juger son choix. Par contre connaissant son humilité et sa sagesse, il a toujours laissé entendre ceci : « J’ai été choisi parmi douze millions de guinéens. Donc, il y’en a d’autres qui peuvent faire mieux que moi ».
Enfin, nous étudiants et admirateurs de Mohamed Camara, retenons de lui, un cadre compétent, intègre, humble et honnête. Sur ce, nul ne peut éteindre la flamme qui brille sur ses épaules.