Burkina: le général Diendéré nie être le cerveau du putsch de 2015
Sa comparution était attendue depuis le début du procès il y a neuf mois : le général Gilbert Diendéré a catégoriquement nié lundi avoir été le cerveau de la tentative de coup d’Etat de 2015 au Burkina Faso.
« Je n’ai ni commandité, ni planifié, ni organisé, ni exécuté ce que d’aucuns appellent le coup d’Etat du 16 septembre 2015 », a déclaré le général à la barre, en treillis militaire et béret rouge, devant une salle d’audience pleine.
« J’ai juste assumé une situation donnée, sur les conseils des médiateurs et après accord de la hiérarchie militaire », a ajouté l’ancien chef du Régiment de sécurité présidentiel (RSP), l’unité d’élite de l’armée qui a perpétré le coup d’Etat.
Lors du pustch, le général Diendéré avait pris la tête du Conseil national pour la démocratie, organe dirigeant des putschistes, avant de rendre le pouvoir face à la pression populaire et à l’armée loyaliste.
Il est accusé d’atteinte à la sûreté de l’État, trahison et meurtre, lors des événements qui ont fait 14 morts et 270 blessés.
Au total 84 accusés sont jugés par un tribunal militaire à Ouagadougou, dont un autre général, Djibrill Bassolé, ancien ministre des Affaires étrangères sous l’ex-président Blaise Compaoré, également présent au procès.
« Le 16 septembre, des personnels du RSP ont fait irruption dans la salle du conseil des ministres, interpellant des responsables dont le président de la transition, le Premier ministre et deux autres membres du gouvernement qui ont ensuite été internés dans la résidence du palais (présidentiel) de Kossyam », a expliqué le général Diendéré, qui fut chef d’état-major particulier de Blaise Compaoré, renversé après 27 ans de pouvoir par un soulèvement populaire en octobre 2014, et auquel succéda un régime de transition.
– Le général incriminé –
« Devant cette situation, une rencontre de la hiérarchie militaire avec des médiateurs, l’ancien président Jean-Baptiste Ouedraogo et le cardinal Paul Ouedraogo, a été organisée ». Puis « la hiérarchie et les médiateurs ont souhaité rencontré le personnel du RSP pour trouver une solution à la crise ».
« Face à l’intransigeance des soldats, les médiateurs ont demandé à l’armée d’assumer. Le chef d’état-major général a dit que l’armée ne pouvait pas assumer et que c’était à ceux qui avaient commencé le mouvement de le faire ».
« Je me suis trouvé obligé de prendre les devants bien que n’ayant pas été au début » du mouvement, a raconté Gilbert Diendéré.
L’audience a été suspendue en milieu de matinée pour disposer davantage de chaises dans la salle, afin d’accueillir plus de public.
Comme depuis le début du procès, un important dispositif sécuritaire était déployé autour du tribunal militaire délocalisé à Ouaga 2000, un quartier huppé de la capitale burkinabè.
Le 12 novembre, le colonel Boureima Kéré, chef d’état-major particulier auprès de la présidence au moment du putsch, avait incriminé à la barre le général Diendéré et la passivité des chefs de l’armée.
« Même si l’armée n’a pas assumé le coup d’État, elle a accompagné le mouvement du général Diendéré », avait-il déclaré.
Lors d’une réunion avec la hiérarchie militaire au ministère de la Défense, le général Diendéré avait menacé ceux qui s’opposeraient au putsch d’être « considérés comme des ennemis et traités comme tel », selon le colonel Kéré.
Le 9 juillet, l’adjudant-chef major Éloi Badiel, considéré comme le chef des opérations du putsch manqué, avait déclaré devant le tribunal avoir agi sur instruction « indirecte » du général Diendéré, précisant que ce dernier avait « instruit de procéder à l’arrestation des autorités de la transition ».
Le 4 juillet, l’adjudant Jean-Florent Nion, membre du commando qui a arrêté les autorités du régime de transition, avait également incriminé le général Diendéré comme le donneur d’ordres du coup d’Etat.
AFP