Pris de court par la simultanéité des menaces, Alpha Condé laisse la main (Le Populaire)
Le régime Alpha Condé semble ne plus se plaire dans l’invective. Face à la simultanéité des menaces, il tend la main aux acteurs sociaux et se refuse de brandir le bâton contre les opposants.
La semaine qui vient de s’écouler marque ainsi une étape dans l’évolution de la politique guinéenne.
Le couronnement d’une sorte d’unité d’action entre une partie du mouvement social et de l’opposition républicaine.
S’il était coriace au point de qualifier ses opposants comme étant «des élèves en politique», et de se targuer de l’invulnérabilité de sa gouvernance, son régime fait face actuellement à de rudes épreuves. Alpha Condé, qui avait l’habitude de tenir jusqu’au bout, commence déjà à encaisser des coups. En voici un ! Le recul face à l’instantanéité des menaces de l’opposition et du syndicat des enseignants.
C’était déjà en septembre 2017 le déclenchement de la grève des enseignants. En ce temps, l’opposition, elle, fait de la tenue des élections communales une priorité avant la fin de l’année. Le gouvernement avait dû recourir à des accords pour satisfaire les revendications.
Entre les deux mouvements, en début 2018, opposants et enseignants, les uns pour les élections et les autres pour le point d’indice salarial 1030, se lancent dans une vague de protestations.
Au moins 10 jeunes sont tués dans les manifestations avant et après la tenue des élections communales.
L’issue des audiences entre le chef de l’Etat et le chef de file de l’opposition n’a abouti presqu’à rien. Sinon que le point essentiel, celui de recomptage des voix dans une vingtaine de circonscriptions. Suite à quoi, les opposants ont à nouveau menacé de manifester à partir du jeudi 3 mai 2018.
Aux mêmes maux, les mêmes remèdes
A la veille, un entretien téléphonique entre Alpha Condé et Cellou Dalein Diallo a suffi pour faire annuler la ville morte.
Le lendemain, l’opposition avait appelé les citoyens à observer une journée ville morte en guise de soutien à cinq opposants, dont Makanéra Kaké le porte-voix, convoqués au tribunal de Dixinn.
Finalement, l’on a compris que la plainte à été déposée par le ministère de l’Intérieur et non la Police CMIS sous la coupole de son patron,Ansoumane Camara alias Baffoe.
Partant du principe selon lequel «qui a bu, boira», il a fallu et il le faudra désormais à Alpha Condé d’interférer dans une procédure judiciaire et en retirer la plainte pour calmer l’opposition.
Pendant ce temps, les enseignants fidèles à Aboubacar Soumah exigeant l’ouverture des négociations, posent aussi une condition face à laquelle le gouvernement s’est exécuté à remplir en envoyant un second courrier cette fois-ci avec la mention Secrétaire général du Slecg.
La première journée a permis aux enseignants de poser des préalables tout indiquant être «prêts à faire des concessions» au cas où…
Le retrait de la plainte contre les opposants a été annoncé par Cellou Dalein Diallo, mercredi 2 mai 2018. Le lendemain, les enseignants reçoivent le second courrier «en bonne et due forme» de la part du gouvernement.
Si ce n’est une façon de reculer pour mieux sauter par-dessus ses opposants, cette simultanéité des revendications politiques et syndicales impose au régime Alpha Condé, désormais à prouver l’inféodation effective des institutions. Toute chose devant apprendre aux gouvernants que lorsqu’on a deux fous sous la main en même temps, la bienséance voudrait qu’on les soigne au même moment.
Par Abdoul Malick Diallo (Le Populaire)