Présidentielle en Sierra Leone: les électeurs moins pressés de voter qu’au premier tour
La participation au second tour de la présidentielle en Sierra Leone semblait en baisse samedi en début d’après-midi, par rapport au premier tour, où elle avait dépassé les 84%, selon les observateurs et des responsables politiques.
Cette diminution du nombre d’électeurs devant les bureaux de vote, constatée par des journalistes de l’AFP mais non confirmée par des chiffres officiels, est due à la « présence de policiers et militaires armés aux abords des bureaux de vote », a dénoncé le candidat du principal parti d’opposition, le SLPP, Julius Maada Bio.
« Je suis déçu par le peu d’électeurs présents », a dit le candidat, arrivé légèrement en tête lors du premier tour le 7 mars, après avoir déposé son bulletin dans le centre de la capitale Freetown.
« Le vote se déroule jusqu’à présent dans le calme. Le processus est juste, transparent et crédible », a toutefois ajouté M. Bio, un ancien militaire de 53 ans qui tente un retour au pouvoir, qu’il a brièvement exercé il y a 22 ans à la suite d’un coup d’Etat avant de le remettre aux civils.
Quelque 3,1 millions d’électeurs sierra-léonais étaient appelés à choisir leur nouveau chef de l’Etat entre 07H00 et 17H00 (GMT et locales) pour cette première présidentielle depuis l’épidémie d’Ebola qui a fait 4.000 morts en 2014-2016, dans un pays déjà dévasté par la guerre civile qui a coûté la vie à quelque 120.000 personnes entre 1991 et 2002.
Les premiers résultats sont attendus dans les prochains jours.
– Présence dissuasive –
La présence de membres des forces de sécurité armés aux abords des bureaux de vote, visible samedi, est selon le pouvoir destinée à empêcher tout incident après une campagne marquée par des violences sporadiques entre partisans de la majorité et de l’opposition.
L’opposition estime toutefois qu’elle pourrait dissuader certains de ses électeurs de se rendre aux urnes. « Je suis effrayé par tous ces hommes armés autour des centres de vote », a confié à l’AFP Mohamed Sesay, une jeune homme de 19 ans qui votait pour la première fois.
Au premier tour, M. Bio, crédité de 43,3% des suffrages, avait devancé de 15.000 voix le peu connu Samura Kamara, ancien ministre des Affaires étrangères et des Finances, homme lige du président sortant Ernest Bai Koroma et candidat de l’APC, le parti au pouvoir, qui avait remporté 42,7% des suffrages.
« Nous savons qu’il y a des infrastructures qui sont construites, mais au niveau du développement humain, c’est zéro. Et c’est ce qui a motivé mon choix », expliquait Lansana Idrissa Daramy, un ingénieur de Freetown.
L’économie reste fragile après le choc de l’épidémie d’Ebola et la corruption est endémique dans l’ancienne colonie britannique. la Sierra Leone, bien que dotée d’un sous-sol riche en métaux et en diamants, reste l’un des pays les plus pauvres au monde.
Isatu Jalloh, une commerçante, explique avoir voté « pour un meilleur système d’éducation » –le cheval de bataille de M. Bio– et pour la création d’emplois pour les jeunes.
L’absence de files s’explique également par une plus grande fluidité que le 7 mars, lorsqu’il y avait 16 candidats à la présidentielle et que le scrutin était couplé à des élections législatives et locales. Ce samedi, il ne fallait que quelques minutes pour voter.
« Le duel est trop serré pour dire qui va l’emporter », expliquait à la veille du scrutin l’analyste politique Edmond Abu.
Les deux partis peuvent en principe compter sur le soutien de leurs fiefs respectifs, dans un pays où les affiliations politiques coïncident souvent avec l’appartenance ethnique ou régionale.
– District diamantifère –
La victoire pourrait dès lors se jouer à Freetown, à la population plus diversifiée, et dans le district diamantifère de Kono, dans l’Est du pays, traditionnellement considéré comme un « swing state », souligne M. Abu.
« Il devrait y avoir un nombre assez surprenant de voix pour le SLPP à Kono et à Freetown », abonde le directeur de l’Institute for Governance Reform, Andrew Lavalie, en soulignant le poids croissant du « vote contestataire ».
Peu populaire au sein de son propre parti, Samura Kamara peut toutefois compter sur le soutien du président sortant Ernest Bai Koroma, qui ne pouvait plus se représenter après 10 ans au pouvoir.
Economiste de 66 ans, gravitant depuis 30 ans dans les sphères du pouvoir et dans les organisations internationales, il a promis que, s’il est élu, l’APC « fera plus dans les domaines des routes, de l’électricité, de la santé et de l’éducation ».
Le second tour, entre les deux partis qui se succèdent au pouvoir depuis l’indépendance de 1961, était à l’origine programmé pour le 27 mars mais a été retardé de quatre jours par un recours en justice de dernière minute.
AFP